Carnets de notes - Documents

Lettres-patentes de décembre 1648

Paris, décembre 1648 : Lettres-patentes portant don au prince de Condé des comtés, terres et seigneuries de Stenay, Dun, Jametz et Clermont.

Transcription

LOUIS, etc. Après avoir reconnu comme nous faisons du profond de notre cœur, que nous tenons de la bonté et toute puissance divine, les prospérités insignes et les avantages notables que nous avons reçus depuis notre avènement à la couronne, nous estimons qu'il n'y a rien de plus convenable que d'en faire paraître notre ressentiment envers ceux, qui, par leur vertu et par leur affection au bien de notre service en ont été les ministres : sur ce fondement nous ne pouvons assez à notre gré, témoigner l'estime que nous faisons de la personne de notre cher et très aimé cousin le prince de Condé, premier prince de notre sang, premier pair et grand maître de France, gouverneur et notre lieutenant général en nos provinces de Bourgogne, Bresse et Berry, ni lui donner une assez digne récompense, eu égard à la grandeur des services qu'il nous a rendus et à notre état, les victoires qu'il a remportées ayant le commandement de nos armées, contre celles de l'empereur, et du roi catholique, et des princes leurs alliés, ennemis déclarés de cet état. Les places qu'il a conquises sur eux, et tous les bons succès dont les emplois que nous lui avons donnés ont été suivis, ont élevé la réputation de nos armes à un si haut point de gloire, que par son moyen elles ont été rendues redoutables, ainsi que victorieuses jusques au cœur de l'Allemagne, et dans des pays où depuis plusieurs siècles celles des plus grands rois, nos prédécesseurs, n'avaient pu parvenir : si bien que les maux, les confusions et les désordres de la guerre, ont été éloignés de notre royaume et portés dans les états des princes qui se sont engagés à des intérêts contraires aux nôtres, dont la suite a été telle, que les dommages qu'ils en ont soufferts et la crainte de les voir augmenter par la force de nos armes, dans la poursuite de nos justes desseins, les ont fait penser à les éviter, en se réduisant aux termes de la raison : dont nous avons tout sujet d'espérer de recueillir des fruits si avantageux pour cette couronne, qu'ils ne seront pas moindres que d'y voir unir des provinces entières, de rétablir une paix universelle dans la chrétienté, et surtout un repos glorieux et assuré pour ce royaume.

Et comme les bonnes qualités de la personne de notre dit cousin répondent à la grandeur de sa naissance, ayant l'honneur de nous toucher en un prochain degré de parenté, il n'a pas donné des preuves moins considérables de sa capacité, et de sa prudence dans nos conseils et dans nos affaires, que de son courage et de sa valeur dans les armées et dans la guerre, ayant ressenti combien ses prudents et sages avis nous ont été utiles depuis qu'il occupe la place de chef de notre conseil, en l'absence de notre très cher et très a[i]mé oncle le duc d'Orléans et qu'il en fait la fonction au lieu de feu notre très cher et très a[i]mé cousin le prince de Condé son père, duquel durant le cours de sa vie cet état a semblablement reçu de si grands et notables services dans les occasions et les affaires les plus importantes, et même dans les premières années de notre règne, que nous estimons encore être obligé de témoigner au public le souvenir que nous en conservons, et de les reconnaître envers ceux de sa maison, et particulièrement à l'endroit de notre dit cousin le prince de Coudé d'à présent, qui en est le principal ornement et appui. C'est ce qui nous a donné sujet de porter nos pensées à donner un accroissement considérable à l'établissement qu'il possède dans notre royaume, en biens, charges et gouvernements, en le gratifiant de quelques terres, seigneuries et places, sachant que nous ne pouvons faire du bien, ni confier la conservation de nos places et la conduite de nos sujets à personne qui ait mérité davantage de nous et de notre royaume, et sur qui nous nous en puissions plus assurément reposer : et ayant considéré d'une part, qu'en donnant à notre dit cousin nos terres, comtés et seigneuries de Stenay, Dun, Jametz, Clermont en Argonne, et les domaines et prévôtés de Varennes et des Montignons ; l'étendue qu'elles ont, le revenu qu'elles pourront produire en temps de paix, et les forteresses qui y sont construites et qui en dépendent, serviront à jamais de témoignage public de la bienveillance que nous portons à notre dit cousin, du désir que nous avons d'accroître sa maison, et de la confiance entière que nous prenons en sa fidélité à notre service, et en son affection pour le bien et la grandeur de notre état : et d'autre part, que ces terres n'étant pas de l'ancien domaine de notre couronne et n'ayant pas été jusqu'à présent compté des revenus d'icelles en notre chambre des comptes de Paris, nous pouvons, sans apporter aucune diminution à notre domaine et à nos revenus et finances, effectuer la résolution que nous avons prise d'en gratifier notre dit cousin. Savoir faisons etc.


Bibliographie

  1. ISAMBERT François André, DECRUSSY, TAILLANDIER, Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l’an 420, jusqu’à la Révolution de 1789, tome XVII, 14 mai 1643 – 19 août 1661, Paris, Belin-Leprieur – Libraire-éditeur, 1829, p. 99-101