Carnets de notes - Documents

Traité de Vienne (1738)

Le traité de Vienne met fin à la guerre de succession de Pologne qui virent s’opposer les partisans de Stanislas Leczinski, beau-père de Louis XV roi de France, et ceux de Frédéric-Augustes II, électeur de Saxe soutenu par l’Autriche et la Russie.

Ne pouvant espérer de victoire en Pologne, la France et son allié l’Espagne portent la guerre en Italie. En 1734, les Français battent les impériaux à Parme et Guastalla et les contraint à abandonner les duchés de Parme et de Plaisance. L’infant don Carlos, fils de Philippe V, bat les Autrichiens à la bataille de Bitondo et s’empare du royaume de Naples et de la Sicile. Le 3 juillet 1735, il se fait couronner à Palerme.

Vaincu, l’Empereur Charles VI demande la paix et signe un accord préliminaire dès le mois d’octobre 1735. Le 18 novembre 1738, le traité final est signé. L’électeur de Saxe monte sur le trône de Pologne. En compensation, Stanislas Leczinski obtient en viager les duchés de Lorraine et de Bar. À sa mort, ils seront incorporés au royaume de France.

Traité

[…]

Article IV

« Quant aux points des traités servant de base à la présente paix, dont la teneur a été changée, tant du consentement mutuel des contractants, que du consentement de ceux qui y étaient intéressés ; ces mêmes conventions, dont il est fait mention dans l’article précédent, suffisent pour en donner une pleine connaissance, et par cette raison elles sont insérées ici de mot à mot. »

[Article préliminaires signés à Vienne entre le roi et l’empereur, le 3 octobre 1735]

« Articles préliminaires

Sa majesté impériale, et sa majesté très-chrétienne, voulant contribuer au plus prompt rétablissement de la paix, sont convenus des articles suivants : 

Article premier

Le roi beau-père de sa majesté très-chrétienne, qui abdiquera, sera reconnu et conservera les titres et honneurs de roi de Pologne, et de Grand-duc de Lithuanie.

On lui restituera ses biens, et ceux de la reine son épouse, dont ils auront la libre jouissance et disposition.

Il y aura une amnistie de tout le passé, et, en conséquence, restitution des biens d’un chacun.

On stipulera le rétablissement et la maintenue des provinces et villes de Pologne, dans leurs droits, libertés, privilèges, honneurs et dignités ; comme aussi la garantie pour toujours, des libertés et privilèges des constitutions des Polonais, et particulièrement de la libre élection de leurs rois.

L’Empereur consent que le roi beau-père de sa majesté très chrétienne, sera mis en possession paisible du duché de Bar et de ses dépendances, dans la même étendue que le possède aujourd’hui la maison de Lorraine.

De plus, il consent que dès que le grand-duché de Toscane sera échu à la maison de Lorraine, conformément à l’article suivant, le roi beau-père de sa majesté très-chrétienne, soit encore mis en possession paisible du duché de Lorraine et de ses dépendances, pareillement dans la même étendue que le possède aujourd’hui la maison de Lorraine. Et ledit sérénissime beau-père jouira, tant de l’un, que de l’autre duché, sa vie durant ; mais immédiatement après sa mort, ils seront réunis en pleine souveraineté et à toujours, à la couronne de France : bien entendu que quant à ce relève de l’empire, l’Empereur, comme son chef, consent à ladite réunion dès-à-présent ; et de plus, promet d’employer de bonne foi ses offices, pour n’en obtenir pas moins son consentement. Sa majesté très-chrétienne renoncera, tant en son nom, qu’au nom du roi son beau-père, à l’usage de la voie et séance à la diète de l’Empire.

Le roi Auguste sera reconnu roi de Pologne et grand-duc de Lithanie, par toutes les puissances qui prendront part à la pacification. »

[…] « Art. VI

Sa majesté très-chrétienne, en considération de ce que dessus, garantira dans la meilleure forme, la Pragmatique Sanction de l’année 1713 pour les états que l’Empereur possède actuellement, ou qu’il possèdera en vertu des présents articles. « 

« Art. VII

Il sera nommé des commissaires de part et d’autre, pour régler entre sa majesté impériale et sa majesté très-chrétienne, les détails des limites d’Alsace et des Pays-bas, conformément aux traités précédents, nommément celui de Bade.

Nous soussignés, en vertu des pleins-pouvoirs de nos maitres, avons arrêtés les présents préliminaires, qui resteront secrets jusqu’à ce qu’il soit convenu autrement entre les parties, et seront ratifiez dans un mois, ou plus tôt se faire se pourra. Fait à Vienne, ce trois d’octobre mil sept cent trente-cinq. »  

[…]

[Convention entre le roi et l’empereur, signée à Vienne le 28 août 1736 pour la cession et remise du duché de Lorraine au roi de Pologne Stanislas I.]

[…]

« Art. XIII

Les duchés de Lorraine et de Bar, soit possédés par le roi Stanislas, soit réunis à la couronne de France, demeureront sous nom : le roi très chrétien promettant encore, que dans le dernier cas, ils formeront un gouvernement dont il ne sera rien démembré pour être uni à d’autres gouvernements. »

[…]

[Suite de l’article IV du traité de paix.]

« La paix rétablie dans le monde chrétien, ayant donc été conclue sur les fondements qui viennent d’être rappelés, sa sacré majesté impériale, tant en son nom, qu’en celui du Saint Empire Romain, et sa sacré majesté royale très-chrétienne, approuvent de nouveau toutes et chacune des dispositions qui se trouvent dans les conventions insérées ci-dessus ; et elles s’obligent le plus fortement pour elles, et leurs héritiers et successeurs, de les observer de la meilleur foi, à perpétuité ; renouvellement expressément tant les promesses qu’elles n’y contreviendront jamais en aucune chose, directement ni indirectement, et qu’elles ne permettront pas qu’il y soit contrevenu par leurs sujets ou vassaux, que les cautions appelées vulgairement garanties, qu’elles se sont réciproquement données sur les points à remplir de la part des autres, en conformité des conventions insérées ci-dessus. Et comme celles qui concernent tant l’abdication de sa sacré majesté royale de Pologne Stanislas premier, et la reconnaissance tant de ce même prince, que de sa sacrée majesté royale de Pologne Auguste III que la cession et restitution des royaumes, états, villes et places, et l’introduction des garnisons de troupes impériales dans les places de Toscane, ainsi que le tout a été statué plus amplement dans les conventions insérées ci-dessus, ont déjà été mises en exécution ; en conséquence, les deux contractants déclarent qu’ils en sont pleinement content. Quant aux points qui, par rapport à la maison de Guastalle, et à d’autres objets, restent ou à discuter peut-être, ou à accomplir en conformité des engagements mutuels, leurs majestés promettent qu’elles y procèderont si bien et si équitablement, par les soins et l’application qu’elles y donneront de concert, que l’on puisse par-là voir chaque jour de plus en plus, combien elles sont unies entr’elles par les liens étroits de l’amitié et de la bonne intelligence pour le bien commun de l’Europe, et pour assurer son repos. »

[…]

Article IX

« Comme la convention conclue le 28 août de l’année 1736 et insérée dans le précédent article IV et qui doit servir et tenir lieu de règle fixe et permanente, tant dans les choses qui regardent la sûreté et les avantages de la maison de Lorraine, que dans les autres points y contenus, a été précédée du consentement du sérénissime duc de Lorraine et de Bar ; ce même consentement a depuis été, par cette considération, étendu plus amplement, par un acte solennel de cession, qui est de la teneur suivante :

[Acte de cession du duc de Lorraine, des duchés de Lorraine et de Bar du 13 décembre 1736]

« Nous François III par la grâce de dieu, duc de Lorraine, roi de Jérusalem, marquis, duc de Calabre, de Bar, de Gueldres, de Montserrat, de Teschen en Silésie, prince souverain d’Arches et Charleville, marquis du Pont-à-Mousson et Nomeny, comte de Provence, Vaudemont, Blamont, Zutphen, Saarverden, Salm, Falckenstein : Savoir faisons qu’ayant eu communication des articles préliminaires arrêtés et signés le 3 octobre de l’année dernière 1735 entre sa majesté impériale et catholique, et sa majesté très-chrétienne, ensemble du traité d’exécution des préliminaire, du 11 avril de la présente année, notamment des articles séparés faisant partie de ce traité, en conséquence desquels il aurait été conclu entre sa majesté impériale et catholique, et sa majesté très-chrétienne, une convention le 28 août de la présente année, qui nous a été pareillement communiquée : déclarons que, nonobstant la répugnance que nous avons, d’abandonner l’ancien patrimoine de notre maison, et surtout des sujets qui nous ont donné, et aux ducs nos prédécesseurs, des preuves si marquées de leur zèle et de leur affection ; le parfait attachement que nous avons pour sa majesté impériale et catholique, et pour sa majesté très-chrétienne, et le désir de voir rétablir la paix et l’union entre des princes à qui nous appartenons par des liens qui nous sont si chers, et de procurer la paix à l’Europe, nous déterminent d’accéder, non-seulement auxdits préliminaires, mais encore à la convention conclue entre leurs dites majestés impériale et catholique, et très-chrétienne, le 28 août de la présente année, en adoptant pleinement toutes les causes et conditions qui y sont stipulées.

En conséquence, nous avons cédé et abandonné, cédons et abandonnons, sous les clauses et conditions portées, tant par les articles préliminaires, que par ladite convention mentionnée ci-dessus, pour nous et nos successeurs, dès-à-présent, par ces présentes, au sérénissime roi de Pologne, grand-duc de Lithuanie Stanislas premier, beau-père de sa majesté très-chrétienne, notre duché de Bar, tant appelé Barrois mouvant, que non-mouvant, appartenances et dépendances, soit d’ancien patrimoine, acquisitions, ou biens allodiaux, et à titre que ce puisse être, et après son décès, à sa majesté très-chrétienne, et à ses successeurs rois de France, en tout droit de propriété et souveraineté, ainsi et de même que nous en avons joui jusqu’à présent : avons déclaré et déclarons par le présent acte, tous nos sujets du duché de Bar, absous du serment de fidélité auquel ils étaient liés envers nous et nos successeurs.

Déclarons en outre, que nous céderons et abandonnerons pareillement, sous les mêmes clauses et conditions énoncées, tant par les articles préliminaires, que par la convention susdite, pour le temps y stipulé, notre duché de Lorraine, les appartenances et dépendances, soit d’ancien patrimoine, acquisitions ou biens allodiaux, et à quelque titre que ce puisse être, à l’exception de ce qui nous a été réservé par cette même convention, audit seigneur roi beau-père de sa majesté très-chrétienne, et après son décès, à sa majesté très chrétienne, et à ses successeurs rois de France, en tout droit de propriété et souveraineté, ainsi que nous en avons joui jusqu’à présent ; relèverons et absoudrons nos sujets dudit duché de Lorraine, du serment de fidélité auquel ils sont liés envers nous et nos successeurs.

En foi de quoi, nous avons aux présentes, signées de notre main, fait mettre et apposer notre scel [sceau] secret. Fait à Vienne, ce treizième décembre mil sept cent trente-six. 

Signé François (L.S.) Contresigné Toussainct. »

[Continuation de l’article IX du traité de paix]

« Et la remise actuelle des susdits duchés a été dans la suite exécutée, sa sacré majesté royale très-chrétienne n’ayant consenti à ce qu’elle fût un peu différée, par rapport au duché de Lorraine, pour d’autre cause, qu’afin que les solennités des noces de la sérénissime et très-puissant reine de Sardaigne, pussent être célébrées avec plus de dignités.

C’est pourquoi, tout ce à quoi il devait être satisfait de la part du sérénissime duc de ce nom, ayant déjà été entièrement accompli, on renouvelle, en la manière la meilleure et la plus valide que faire se peut, les garanties dont se sont chargées sa sacré majesté royale très-chrétienne, en faveur, tant de ce même prince, que de ses héritiers et successeurs, savoir, de tous ceux à qui, sans cette cessions, le droit de succéder dans l’un et l’autre duchés, nommés ci-dessus, aurait appartenu ; à ces garanties devant valoir à perpétuité, aussi-bien que celles qui ont été données réciproquement par sa sacrée majesté impériale, à sa sacré majesté royale très chrétienne, au roi sone beau-père, et à la couronne de France, en vertu de la susdite convention. »


Bibliographie

  1. DAUBAN Charles Aimé, Histoire moderne et contemporaine depuis le règne de Louis XIV jusqu' à nos jours, Paris, Chez Delagrave et Cie, 1867, pp. 96-97
  2. Traité de paix entre le Roy, l’Empereur et l’Empire. Conclu à Vienne, le 18 novembre 1738, Paris, l’Imprimerie Royale, 1739, pp. 11-15, 28, 30-32 et 79-82