Archives de l’État à Arlon
C. Archives des institutions de droit public (Époque contemporaine)
Administration du cadastre
Expertise des communes (1819-1823) : Harnoncourt
La commune d’Harnoncourt est située à cinq mille de Virton chef-lieu du canton, à quatre lieux de Neufchâteau chef-lieu d’arrondissement, à cinq lieux de Luxembourg chef-lieu du Grand-Duché de ce nom et à un lieu de Montmédy petite ville forte de France. Aucune grand-route n’est à proximité.
Il se tient un marché hebdomadaire à Virton ; mais le débit de grain y étant peu considérable, il n’est fréquenté que par les habitants qui n’ont qu’une petite quantité à vendre ; les grands cultivateurs attendent que les marchands viennent l’acheter chez eux, et ordinairement il se vend plus cher ainsi qu’au marché.
Cette commune est traversée du nord-est au sud-ouest par la rivière le Ton. Elle n’est point navigable et loin d’être avantageuse aux habitants, elle leur cause de grands dommages par ses débordements annuels qui mordent les prairies avoisinantes et y dépose d’un côté un sable aride et portent de l’autre des eaux qui y séjournent et altèrent la qualité des herbes.
Les débordements de cette rivière sont également nuisibles au village de Lamorteau qui est situé au niveau du lit de la rivière et où par cette raison il ne peut exister aucune cave. Les habitants n’ont que des celliers pour [serrer] leurs provisions.
Les productions principales de cette commune consistent en froment, orge, avoine, pomme de terre, trèfle, foin et bois.
On y sème très peu de méteil et l’on ne voit que çà et là quelques pièces cultivées en pois, chanvre et lin.
Il existe dans cette commune, trois espèces de terres labourables très différentes : la première se trouve sur le coteau situé au midi de la commune ; c’est une terre forte, pierreuse qui contient beaucoup de substance [salines ?] et où les récoltes en froment et plus encore en orge sont pour ainsi dit certaines. La seconde est située sur le coteau qui est au couchant de la commune ; où le terrain est marneux, profond et retenant beaucoup l’humidité. Cette dernière qualité et la grande compacité la rende impropre à l’orge, mais le froment y vient assez bien quoiqu’il soit sujet à y manquer. Ce terrain ne reçoit jamais d’engrais. La troisième occupe un coteau en pente douce qui est situé au levant ; cette terre d’une couleur blanchâtre est assez substantielle, amis elle est sujette à jeter les [semences] à la sortie de l’hiver ; l’avoine et les pommes de terre y viennent très bien.
Les près ne sont pas proportionnellement aussi fertiles que les terres labourables ; les meilleurs sont ceux qui se trouvent aux pieds des coteaux et reçoivent les eaux limoneuses qui descendent des terres labourables lors des saisons pluvieuses. Les plus mauvais se trouvent dans le fond qui est soumis aux inondations du Ton.
Les bois sont médiocres, leur végétation est vive dans le commencement ; mais elle se ralentie lorsque les arbres parviennent à une certaine hauteur ce qui annonce que la terre végétale n’est pas très profonde et que les racines touchent des rochers qu’elles ne peuvent pénétrer.
Les productions en graines de cette commune, excédent de beaucoup les besoins des habitants ; on vend aussi quelques foins, mais on est dans le cas d’acheter une partie du bois nécessaire à la consommation.
Le principal genre d’industrie consiste dans l’agriculture et la vente des bestiaux élevées ou engraissés dans la commune ; ce sont des chevaux, bêtes à cornes et porcs.
Les cultivateurs quoiqu’apporté des forges n’étaient pas dans l’usage de charrier du minerai ou des charbons, ce qui doit présumer qu’ils trouvaient plus d’avantage à s’occuper exclusivement du labour. Circonstance qui prouve pour la fertilité du sol.
La mairie se compose de son chef-lieu et des villages de Lamorteau, de Rouvroy et de Radru qui consiste en une ferme et un moulin.
On y nourrit annuellement 138 chevaux, 222 bêtes à cornes, 350 porcs, 1.500 oies et 400 moutons.
Terres labourables
Nature du terrain
Les terres labourables présentent des différences sensibles qui ont nécessité leur division en quatre classes.
La première est une terre végétale mêlée de pierres calcaires ; elle est assez forte ; mais au moyen des labours qu’on y fait ; elle se divise parfaitement ; elle est située en pente assez inclinée et a environs 10 pouces de profondeur ; telle sont :
Section A, lieu-dit au Gagnage, la pièce N° 93 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à sa propriété, de l’orient à Rouvroy les habitants, du sud à François Jean Baptiste et de l’occident à Gavroy Jean Philippe.
Section B, lieu-dit, aux champs Hachette, la pièce N° 700 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à Herman Jean Philippe, du sud à Noël Mathieu et de l’orient et de l’occident au chemin.
Section C, lieu-dit, Lagaille, la pièce N° 1007 appartenant aux héritiers Maizret, tenant du nord au Comte d’Harnoncourt, de l’orient au chemin, du sud à Genin Noël veuve et de l’occident à Jacques Nicolas Joseph.
La seconde ne diffère de la première qu’en ce qu’elle a moins de profondeur et est plus fortement mêlée de pierres, quelques parties aussi ont au contraire plus de profondeur et renferment moins de pierres ; mais elles reposent sur un […] qui ne laissent aucun passage à l’eau la retient sur sa superficie, qui est alors trop humide pour produire une bonne végétation. Telle sont :
Section A, lieu-dit aux Goutière, la pièce N° 73 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord et du sud à Herman Jean Philippe, de l’orient à Jacques Jean Baptiste et de l’occident au chemin.
Section B, lieu-dit aux longue Raier, la pièce N° 750 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à sa propriété, de l’orient à Jacques Jean François, du sud à Martin François et de l’occident à Jacques Jean François.
Section C lieu-dit, à Verlache, la pièce N° 515 appartenant à Fayon Victor, tenant du nord à François Jean Baptiste, de l’orient à Bouillon Joseph par la veuve, du sud à Saussoin […] Joseph et de l’occident à Depouc la veuve.
La troisième estimée en partie de même nature que la première mais elle est moins profonde et plus pierreuse, ou, plus profonde et plus humide. L’autre partie est une terre marneuse ayant beaucoup de profondeur ; elle est très difficile à labourer et quoique située en pente assez rapide, elle retient assez fortement l’humidité.
Telle sont :
Section A, lieu-dit, au chenois ; la pièce N° 166 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à Glaisener Nicolas, de l’orient et du sud à ses propriétaires et de l’occident à Jacques Jean François.
Section B, lieu-dit, au-dessus le pré Cordonnier, la pièce N° 21 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord au chemin, de l’orient à Bouillon Jean Antoine et du sud et de l’occident à Adam Jean Antoine.
Section C, lieu-dit, à Parfondeur, la pièce N° 1220 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à Jacques Nicolas, de l’orient et de l’occident à divers propriétaires et du sud à Bouillon François.
La quatrième classe estimée de même nature que la précédente, mais d’un côté elle est très pierreuse ayant seulement 4 à 5 pouces de profondeur, tandis que de l’autre côté elle a plus de sol, mais qui est plus compact et plus humide. Telles font :
Section A, lieu-dit au Chenois, la pièce N° 179 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à Jacques Jean François, de l’orient à Thomas François, du feu à Lalangue Henry Henry et de l’occident au Baron Dumesnil.
Section B, lieu-dit à la Rondeille, la pièce N° 224 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à Saint-Mard, de l’orient et du sud à ses propriétaires et de l’occident à Chenet François la veuve.
Section C, lieu-dit, au plat de Massure, la pièce N° 1351 appartenant aux héritiers Maigret, tenant du nord à Bouillon Jean François veuve, de l’orient à Bertrand Gilbert, du sud au chemin et de l’occident à Villers Charles la veuve.
Propriété du terrain
Les terres des quatre classes sont propres au froment et à l’orge, sauf une grande partie des deux dernières classes où, au lieu d’orge, on sème de l’avoine. Ce n’est aussi que dans les deux premières classes que l’on cultive les pommes de terre et le trèfle.
Genre de culture
On donne à la terre de toutes les classes trois façons de charrue et une de herse pour les durs grains et pour l’orge, à l’exception cependant de la partie de terrain cultivé en trèfle et pommes de terre qui n’est labouré qu’une fois. L’avoine ne reçoit qu’un labour.
Deux hommes conduisent la charrue attelée de 5 à 8 chevaux pour les 1er labours et de 4 pour les autres.
Engrais, sarclage, assolement
Les engrais proviennent des pailles récoltées dans la commune.
On est dans l’usage de sarcler les graines.
La succession des assolements est de trois ans pour toutes les classes conformément au tableau ci-après.
Classes | 1ère année froment | 2ème année | 3ème année | |||
---|---|---|---|---|---|---|
orge | avoine | pommes de terre | trèfles | |||
1 | 10 | 15 | 8 | Pour un | ||
2 | 8 | 12 | 7 | |||
3 | 6 ½ | 9 | 8 | |||
4 | 4 ½ | 7 | 6 |
[…]
Jardins
Ils sont divisés en deux classes.
Ils sont généralement situés près des habitations, mais ils ont un sol plus ou moins profond, plus ou moins compact, et plus ou moins humide. Quelques-uns enfin sont assujettis aux inondations de la rivière le Ton.
La première classe renferme ceux qui peut être assujetti aux inondations du Ton, ont le sol le plus profond, le plus friable et qui sont les plus avantageusement situés pour conserver l’humidité nécessaire à cette nature de propriété.
Tous les autres ont été rangés dans la seconde classe.
Ils sont tous cultivés en gros légumes par des cultivateurs ou manœuvres.
Cette nature de propriété étant à portée des habitations peut recevoir avec moins de frais, une culture mieux soignée que les terres labourables et par suite donner des produits plus abondants. Les jardins ont donc une plus-value sur les terres labourables […]
Prés
Ils sont divisés en trois classes.
La première est située au pied des coteaux dont elle reçoit les eaux qui y déposent le limon charrié dans les terres labourables. Quelques-uns sont arrosés par des eaux de sources. Tous produisent du foin et du regain de bonne qualité. Tels sont :
Section A, lieu-dit, au Long Pré, la pièce N° 293 appartenant à Jacques Braffort, tenant du nord à Cholet Henry Joseph, de l’orient et de l’occident à françois Jean Baptiste et du sud à Fayon Victor.
Section B, lieu-dit à Donnerant, la pièce N° 52 appartenant à Francques Jean Baptiste, tenant du nord au Comte d’Harnoncourt, de l’orient à la Bourse de Virton, du sud à Herman Jean Philippe et de l’occident à la rivière.
Section C, lieu-dit à L’Enclos, la pièce N° 625 appartenant à Barré Poncignon, tenant du nord à Genin Noël veuve, de l’orient à Cholet Henry Joseph, du sud à la Rivière et de l’occident à Jacques Jean Baptiste.
La deuxième classe est située au-dessous de la précédente et reçoit les mêmes eaux, mais qui étant dépouillés de la majeure partie de leurs engrais, donnent un moindre degré de fertilité à la terre. Une autre partie est située dans le fond qui est baigné par la rivière du Ton, dont les eaux séjournent trop d’un côté, et de l’autre déposent un sable qui dessèche les prés. Tels sont :
Section A, lieu-dit à Donnernant, la pièce N° 52 appartenant à François Jean Baptiste, tenant du nord à Genin Georges Henry, de l’orient et du sud au ruisseau, et de l’occident à sa propriété.
Section B, lieu-dit aux Roses, la pièce N° 578 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord à martin François, de l’orient et de l’occident au chemin, et du sud à Herman Jean François.
Section C, lieu-dit à Sauçue, la pièce N° 707 appartenant à Jacques Jean Baptiste, tenant du nord à la rivière, de l’orient à Fayon Jean Gérard, du sud au chemin, et de l’occident à Ricail les héritiers.
La troisième classe est en majeure partie située dans le fond de près mentionné dans la seconde classe ; le terrain est ou fangeux ou très sec, le premier produit beaucoup d’herbes de mauvaise qualité, le second produit fort peu mais d’une bonne qualité, quoiqu’un peu dure. Une partie des prés de cette classe se trouve entre les terres labourables en des lieux secs où il vient également peu d’herbe mais est également de bonne qualité. Tels sont :
Section A, lieu-dit à Watimpré, la pièce N° 158 appartenant à Gilles Louis, tenant du nord et de l’occident au Comte d’Harnoncourt, de l’orient à Dampicourt, et du sud à Monseigneur de Hontheim.
Section B, lieu-dit, à Sauçue, la pièce N° 854 appartenant à jacques Jean Henry, tenant du nord au Comte d’Harnoncourt, de l’orient à Jacques Jean Philippe, du sud à Genin Georges Henry et de l’occident à Harnoncourt la commune.
Section C, lieu-dit aux Angles, la pièce N° 668 appartenant à Barré Poussignon, tenant du nord à Bassin Jean François, de l’orient à Cholet Henry Joseph, du sud à la rivière et de l’occident à Genin Joseph.
[…]
Pâture
Il n’en existe que deux bonniers dans la commune. Elles sont situées sur le bord du Ton qui, par les sables qu’il a déposés les a tellement desséchées, qu’elles ne produisent plus que très peu d’herbes. L’expert estime qu’elles peuvent être évaluées au tiers des près de dernière classe.
[…]
Bois
Ils sont divisés en deux classes qui offrent peu de différence. Ils sont tous situés au midi de la commune, sur le sommet des coteaux ; leur essence est de hêtres et de charmes mêlés de chênes et de bois blancs ; ce dernier meurt tout avant l’exploitation des arbres sont d’assez belle tenue, mais ils ne parviennent pas à une grande hauteur. Ils sont tous aménagés à 22 ans.
La première classe diffère de le seconde en ce qu’elle est mieux peuplée et que la végétation y est plus vive. Elle produit à chaque exploitation 20 condés et 300 fagots. Tels sont :
Section A, point de bois.
Section B, lieu-dit au Bois, le Bois n° 897 appartenant au Comte d’Harnoncourt, tenant du nord et de l’orient au chemin, et du sud et de l’occident à la commune d’Harnoncourt.
Section C, lieu-dit Harbaufont, le bois N° 2264 appartenant à la commune de Lamorteau, tenant du nord et de l’orient au chemin, du sud à Torgny la commune et de l’occident à Gillet Louis.
La deuxième classe ne produit au même âge que 16 condés et 250 fagots. Tels sont :
Section A, point de bois.
Section B, lieu-dit au Bois, le bois N° 889 appartenant à la commune d’Harnoncourt, tenant du nord à différents propriétaires, et des trois autres côtés au chemin.
Section C, lieu-dit Drusigny, le bois N° 2253 appartenant à la commune de Lamorteau, tenant du nord à martin Jean Baptiste la veuve, de l’orient et de l’occident à Francques Jean Baptiste, et du sud à Torgny la commune.
[…]
Buissons ou broussailles
Les propriétés comprises sous cette dénomination occupent un terrain fangeux situé au-dessus du moulin de Radru. Il est couvert de bois blanc et le fond offre une pâture très peu substantielle puisqu’elle ne reçoit point de soleil et qu’elle croit sur un sol constamment humide. L’expert estime que son produit tant en bois qu’en herbe peut être évalué à un florin par an et par journal.
Réservoir
Il n’en existe qu’un dans la commune et il sert à retenir l’eau qui alimente le moulin de Radru. Il sera évalué conformément à l’art. 387 du règlement au taux de meilleures terres labourables de la commune. […]
Terres vaines
Il en existe huit bonniers dans la commune.
Elles sont situés sur le sommet des coteaux, leur sol est pierreux et n’a que 3 ou 4 pouces de profondeur. […]
Superficies des bâtiments
L’évaluation de la superficie des propriétés bâties est déterminée par la loi ; elle doit être la même que celle des terres labourables de 1ère classe de la commune […]
Moulin à farine
Il existe dans cette commune une seule usine appartenant au Comte d’Harnoncourt.
C’est un vaste et superbe bâtiment qui renferme un moulin à farine et un moulin à scier le bois. Le 1er est à deux tournants et le second à un seul et a une lame.
Ces trois tournants ne peuvent être activés ensemble que lors des saisons pluvieuses ; en été, il faut retenir l’eau pendant les deux tiers de la journée pour faire tourner une seule roue le restant du temps.
Cette usine est louée au sieur Bernard Jean baptiste depuis le 16 septembre 1820 pour 245 florins déduction faite de la superficie du réservoir et d’un petit jardin loué avec le moulin. Mais il est de notoriété publique que ce loyer est trop élevé, et que le locataire ne pourrait y rester sans se ruiner.
En conséquence, l’expert croit devoir s’écarter du prix du bail […]
Scierie
Il n’en existe qu’une dans la commune et l’estimation est faite ci-dessus.
Maisons
Elles sont divisées en sept classes.
La 1ère se compose de trois maisons bourgeoises. L’une d’elle est plus vaste que les deux autres, mais elle est sujette à être inondée lors des débordements du Ton, ce qui empêche d’y avoir une cave et d’habiter le rez-de-chaussée une partie de l’hiver. Cet inconvénient lui ôte la plus-value qu’elle aurait d’ailleurs sur les deux autres.
Toutes les autres maisons sont habitées par des cultivateurs et manœuvres.
L’expert les a classées suivant leur étendue, le nombre de chambre dont elles sont composées, la distribution de celle-ci et la commodité que l’ensemble du bâtiment présente. Le tout eu égard à l’inconvénient auquel sont sujettes les maisons de Lamorteau par rapport aux débordements du Ton.
Aucune maison n’étant louée séparément dans la commune, elles seront évaluées comparativement à celles des autres communes déjà cadastrées, ainsi qu’il suit […]