Carnets de notes - Archives

8 octobre 1880 : Etienne Wagner contre Henri Saintmard

Belgique : Archives de l’État à Arlon

Justice de paix du canton de Virton

Date : 8 octobre 1880

N° 439

Audience publique du huit octobre mil huit cent quatre-vingt.

Entre Étienne Wagner, débitant domicilié à Chenois, demandeur d'une part.

Et Henri Saintmard, maçon demeurant au même lieu défendeur, d'autre part.

Faits. Le demandeur fit inviter le défendeur à comparaître devant le tribunal pour s'entendre condamner à enlever et supprimer les lieux d'aisances qu'il a établis contre le mur de soutènement de son jardin, mur qui est la propriété du demandeur et ce dans les vingt-quatre heures de la signification du jugement à intervenir, sous peine de dix francs de dommages intérêts pour chaque jour de retard; voir dire que faute de se faire dans ledit délais le demandeur sera autorisé de faire disparaître lesdits communs aux frais du défendeurs, et que celui-ci sera tenu de lui rembourser le montant de ses déboursés sur la production de la quittance des ouvriers employés à cette fin, dépenses qui sont évaluées à vingt francs; s'entendre en outre condamner aux dépens ;

Le défendeur représenté par son épouse Marguerite Ribonnet sans profession demeurant avec lui, sa mandataire suivant acte sous seing privé en date du-vingt-un novembre dix-huit cent septante un, enregistré à Virton, le vingt-quatre même mois, volume cinquante-six, folio quarante-cinq recto case trois aux droits de deux francs vingt centimes perçus par le Receveur Reding, répond que ses lieux existent depuis plus de trente ans. Il reconnaît que le lieu dépassant les jardins des parties est la propriété du demandeur, et que les lieux sont établis contre ce mur.

Le demandeur demande la visite des lieux.

En droit : Y-a-t-il lieu d'ordonner la visite des lieux ?

Attendu que pour l'intelligence de la cause la visite des lieux est indispensable et que d'ailleurs elle est demandée par l'une des parties.

Par ces motifs, le tribunal avant de faire droit ordonne qu'il se transporte sur les lieux litigieux pour les visiter, le mardi onze octobre prochain, à trois heures de relevée, dépens réservés.

Ainsi jugé et prononcé en la salle ordinaire des audiences de la justice de paix à Virton, parties dûment représentées, siégeant Messieurs Philippe André Adolphe Rousseau, Juge de paix et Joseph Nefontaine greffier.


Date : 22 octobre 1880

N° 456

Enregistré à Virton, le

Audience publique du vingt-deux octobre mil huit cent quatre-vingt.

Entre Étienne Wagner, débitant domicilié à Chenois, demandeur d'une part.

Et Henri Saintmard, maçon demeurant au même lieu, défendeur représenté par son épouse Marguerite Ribonnet sans profession demeurant avec lui, sa mandataire, suivant acte sous seing privé en date du vingt un novembre mil huit cent septante un, enregistré à Virton, le vingt-quatre même mois, volume cinquante-six, folio quarante-cinq recto case trois, aux droits de deux francs vingt centimes perçu par le Receveur Reding, et autre part.

Faits. Le demandeur fit inviter le défendeur à comparaître devant le tribunal, pour s'entendre condamner à enlever et supprimer, les lieus d'aisances qu'il a établis contre le mur de soutènement de son jardin, mur qui est la propriété du demandeur et ce dans les vingt-quatre heures de la signification du jugement à intervenir, sous peine de dix francs de dommages intérêts par chaque jour de retard ; se voir dire que faute de se faire dans ledit délai, le demandeur sera autorisé à faire disparaître lesdits communs aux frais du défendeur, et que celui-ci sera tenu de lui rembourser le montant de ses déboursés sur la production de la quittance des ouvriers à cette fin, dépenses qui sont évaluées à vingt francs; s'entendre en outre condamner aux dépens.

La mandataire du défendeur à l'audience du huit octobre courant, répondis que les lieux de son mandant existaient depuis plus de trente ans. Elle reconnut que le mur séparant les jardins des parties est propriété du demandeur, et que les lieux et aisances dont s'agit sont établis contre ce mur.

Le demandeur demanda la visite des lieux.

Par jugement dudit jour huit octobre, le tribunal avant faire droit, ordonna qu'il de transporterait sur les lieux litigieux pour les visiter, le mardi onze même mois, à trois heures de relevée.

Aux jour et heures fixés, il fut procédé à la visite ordonnée, et parties ouïes la cause fut continuée pour y être fait droit, à l'audience de ce jour, où il est statué ;

En droit : Y-a-t-il lieu d'adjuger au demandeur ses conclusions ?

Attendu qu'il est résulté de la visite par nous faite des lieux litigieux :

1° que les parties sont respectivement propriétaires des maisons séparées entre elles par un terrain cultivé en jardin, terrain qui, à la moitié environ de sa longueur est séparé par un mur délimitant la portion déférente à chaque maison,

2° que ce mur qui, du côté du défendeur, ne s'élève pas au-dessus du sol, sert à maintenir les terres du jardin de celui-ci et relativement auquel l'autre est en contre bas, par suite d'un nivellement en déblai effectué par le demandeur ;

3° que c'est tous contre ce mur et à peu près à distance égale de l'une et de l'autre maison (plusieurs mètres)[1], qu'est situé le lieu d'aisance dont s'agit en procès ;

4° que ce lui consiste en un abri fort peux garnit et en une fosse simplement creusée dans la terre et dont le mur lui-même forme un des côtés, sans être munie à cet endroit d'aucune espèce de revêtement qui puisse empêcher les infiltrations ;

Attendu que le défendeur reconnaît que le mur en question est la propriété exclusive du demandeur ;

Attendu que quand l'emplacement même occupé par le lieu d'aisance est considéré, abstraction faite, de sa contiguïté au mur, et ne constitue d'infraction à aucun usage du règlement local, qu'il n'y a donc pas lieu d'ordonner pour ce motif, au défendeur de le déplacer, mais,

Attendu que la fosse se trouvant creusée contre il a été dit peux haut, sans qu'aucun travail ait été fait, sans qu'aucune précaution ait été prise pour garantir le mur du demandeur, constitue elle une infraction à l'article 674 du code civil ;

Attendu que le défendeur prétend vainement que cet état de chose reste depuis plus de trente ans, car cela fut il même vrai, ce que conteste formellement le demandeur, encore est-il que du moment où un préjudice en résulte actuellement, pour ce dernier, par des infiltrations se produisant de son côté, il a droit à le faire cesser, aux termes des articles 1382 et 1383 du code civil, lesquels du reste servant de base à notre article 674, précité ;

Attendu en effet que cela est tellement vrai que les distances et les précautions prescrites par les règlements et usages, [...] elles même été [...], si les incommodités et inconvénients desquelles il s'agit de produisent nonobstant, il y a, pour le propriétaire des lieux, obligations de remédier à cet état de choses nuisibles ;

Attendu que le demandeur pose en fait que des infiltrations très incommodes et même nuisibles se produisent; que certaines traces de ces infiltrations nous ont semblé réellement exister et que du reste il est pour ainsi dire inévitable qu'il en soit autrement, puis qu'il n'a été pris aucune espèce de précautions, pas même les plus simples; et pour mettre le mur à l'abri de semblable inconvénient, ce qui est absolument contraire au prescrit de l'article 674 ;

Attendu qu'il n'existe dans la localité ni usage ni règlement fixant les ouvrages à exécuter dans le cas qui nous occupe ; qu'il y a donc lieu de décider la question d'après le quid utilius ainsi que l'enseignent les juris consultes et notamment [........................].

Attendu d'autre part que s'il est loisible au défendeur de maintenir les terres dont s'agit, à l'endroit qu'il occupe actuellement les convenances lui imposent l'obligation de les abriter suffisamment contre les regards du voisin ;

Par ces motifs, nous Juge de paix disons que le défendeur est sans droit pour exiger la suppression des lieux d'aisances du défendeur, mais qu'il est fondé à demander que celui-ci fasse le nécessaire pour empêcher toute infiltration des matières fécales dans le mur qui lui appartient, soit en laissant entre ce mur et la fosse un intervalle de un mètre de terre, soit établissant contre mur d'une épaisseur de trente centimètre et construit à la chaux et ce dans les huit jours de la signification du présent jugement, sous peine de cinquante centimes, par chaque jour de retard; disons qu'il devra le garantir contre les regards au moyen d'un abri suffisant; condamnons le défendeur aux dépens liquidés y compris la minute du présent jugement à dix-neuf francs vingt centimes.

Ainsi jugé et prononcé en la salle ordinaire des audiences de la justice de paix à Virton, siégeant Messieurs Philippe André Adolphe Rousseau Juge de paix et Joseph Nefontaine greffier.


[1] Entre parenthèse dans l’acte