Carnets de notes - Un monde de paysans

IX. Petits biens immobiliers

Le jardin d’Armelle à Stenay. (Stenay ; Meuse)

Livre : Un monde de paysans. La basse vallée du Ton entre Vire et Chiers : Description d’un paysage et d’une société rurale.
Remarque : Les superficies sont exprimées en mètre carré ou centiare.

Les enclos

« Entouré d’une clôture. Jardin enclos de mur. [i]» (Littré 1874)

« Espace enfermé dans une enceinte de murs, de haies, etc. [ii]»

Nature Nombre de parcelles cadastrales Superficie (m²)
Labours clos 11 44.910
Pré clos 65 281.850

Les incultes

« Qui n’est point cultivé. Des terres qui demeurent incultes. [iii]» (Littré 1874)

Nature Nombre de parcelles cadastrales Superficie (m²)
Inculte 29 30.600

Qui est propriétaire des terres incultes ?

Professions / Statut Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Personnes physiques sans profession 17 58,62 % 18.880 61,70 %
Commerçants 2 6,90 % 4.910 16,05 %
Paysans (cultivateurs et journaliers) 6 20,69 % 4.410 14,41 %
Institution 3 10,34 % 1.860 6,08 %
Artisan 1 3,45 % 540 1,76 %
Total général 29 100,00 % 30.600 100,00 %

Les jardins

« Espace clos d’ordinaire, planté de végétaux utiles ou d’agrément. [iv]» (Littré 1874)

Nature Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Jardin 757 99,34 % 427.115 98,28 %
Jardin d’agrément 1 0,13 % 3.190 0,73 %
Jardin curial 2 0,26 % 2.280 0,52 %
Jardin du presbytère 2 0,26 % 2.020 0,46 %
Total général 762 100,00 % 434.605 100,00 %

Classification fiscale


Classe

Nature 0 2 3 6 7 8 Non classé Total général
Jardin
443 299 2 1 1 11 757
Jardin curial 2





2
Jardin du presbytère

1


1 2
Jardin d’agrément

1



1
Total général 2 443 301 2 1 1 12 762

1re classe

Dans quatre communes sur cinq, les jardins de première classe reposent « sur un terrain appartenant à la première classe de terres labourables. » Pour Harnoncourt, l’expert du cadastre précise qu’ils peuvent « être assujetti aux inondations du Ton, ont le sol le plus profond, le plus friable et qui sont les plus avantageusement situés pour conserver l’humidité nécessaire à cette nature de propriété. [v]»

La proximité aux habitations est une caractéristique commune aux jardins de cette classe. À Dampicourt, cela n’est pas écrit explicitement dans le tableau de classification des propriétés foncières, mais la parcelle référence est à lieu-dit au Village.

Les jardins sont cultivés par des laboureurs ou manœuvres (Dampicourt) en gros légume et chanvre. À Dampicourt et Saint-Mard, on y cultive du lin. À Torgny, de la pomme de terre. À Dampicourt, « quelques-uns sont arborés et produisent des fruits de bonne qualité. [vi]» À Saint-Mard, les jardins sont plus ou moins arborés. L’expert n’évoque pas les productions à Harnoncourt et Montquintin.

Les propriétaires des jardins « ne tire aucun parti des produits, tous de consomment pour les besoins du ménage [vii]». (Saint-Mard)

L’expert « estime qu’en raison des engrais abondants et d’une culture mieux soignée que cette nature de propriété reçoit », les jardins de première classe doivent « être évaluée un tiers en sus des terres labourables de première qualité ».

Lieux-dits de référence :

  1. Dampicourt, lieu-dit au Village.
  2. Montquintin, section A, lieu-dit Au Village de Couvreux.
  3. Montquintin, section b, lieu-dit le village de Montquintin.
  4. Saint-Mard, section A, lieu-dit au Vieux Virton.
  5. Saint-Mard, section B, lieu-dit à Saint-Mard.
  6. Torgny, section A, lieu-dit au village.

2e classe

Les jardins de seconde classe ont moins de caractéristiques communes que ceux de première classe. À Montquintin, Saint-Mard et Torgny, ils sont plus éloignés des habitations. Ils sont « à portée des habitations [viii]» à Harnoncourt. À Dampicourt, ils sont à lieu-dit au Village sans autre précision.

La qualité de la terre des jardins est celle des terres labourables des deux premières catégories à Saint-Mard, et de deuxième classe à Montquintin et Torgny. À Dampicourt, ils sont « exposés aux débordements du Ton » et « sont humides et pierreux [ix]». À Harnoncourt, ils peuvent « recevoir avec moins de frais, une culture mieux soignée que les terres labourables et par suite donner des produits plus abondants. [x]»

À Saint-Mard et Torgny, ils sont situés « à des expositions moins favorables [xi]».

L’expert estime que les jardins de seconde classe doivent être évalués aux taux des terres de première classe.

Lieux-dits de référence :

  1. Dampicourt, au Village.
  2. Montquintin, section A, lieu-dit l’Enclos.
  3. Montquintin, section B, lieu-dit près d’Église.
  4. Saint-Mard, section A, lieu-dit au Vieux Virton.
  5. Saint-Mard, section B, au village.
  6. Torgny, section A, lieu-dit aux Isles.

Qui est propriétaire des jardins ?


Professions / Statut Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Paysans (cultivateurs et journaliers) 316 41,47 % 166.008 38,20 %
Personnes physiques sans profession 131 17,19 % 98.384 22,64 %
Artisans 174 22,83 % 70.080 16,12 %
Institution 86 11,29 % 69.118 15,90 %
Autre profession 21 2,76 % 14.864 3,42 %
Aubergistes — cabaretiers 16 2,10 % 6.416 1,48 %
Métier d’autorité 10 1,31 % 6.385 1,47 %
Commerçants 8 1,05 % 3.350 0,77 %
Total général 762 100,00 % 434.605 100,00 %

Les terres vaines et vagues

Nature Nombre de parcelles cadastrales Superficie (m²)
Terres vaines 85 286.303

Le terme chétif qualifie le mieux les terres vaines : « Chétif produit [xii]» à Dampicourt, « faible pâture [xiii]» à Saint-Mard. À Torgny, « les terrains de vague produisent pendant quelques mois de l’année un chétif pâturage [xiv]».

À Dampicourt, les friches sont localisées le long des chemins ou sur le sommet d’un point élevé. À Harnoncourt, sur le sommet des coteaux.

Les sols sont pierreux (Dampicourt et Harnoncourt). À Montquintin, « ce sont des tas de pierres, ou des terrains chargés de pierres [xv]».

Les experts du cadastre les évaluent « au minimum fixé par la loi » à la réserve de Dampicourt où elles sont évaluées au maximum au « cinquième de celui des terres labourables de quatrième classe[xvi]». 

Qui est propriétaire des terres vaines ?

Professions / Statut Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Institution 23 27,06 % 151.386 52,88 %
Personnes physiques sans profession 29 34,12 % 84.028 29,35 %
Paysans 26 30,59 % 37.629 13,14 %
Autre profession 2 2,35 % 6.800 2,38 %
Artisans 3 3,53 % 5.210 1,82 %
Aubergistes — cabaretiers 2 2,35 % 1.250 0,44 %
Total général 85 100,00 % 286.303 100,00 %

Les vergers

« Lieu planté d’arbres fruitiers. [xvii]» (Littré 1874)

Dans chaque village, nous trouvons des vergers néanmoins ils ne sont documentés dans le tableau de classification des propriétés foncières que pour les communes de Saint-Mard et Torgny. Ils sont plantés en pommiers, poiriers, pruniers et cerisiers sur des terres labourables de première classe.

L’expert « estime que la plantation ajoute un tiers à la valeur du fond. »

Nature Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Verger 75 98,68 % 100.312 99,41 %
Verger du presbytère 1 1,32 % 600 0,59 %
Total général 76 100,00 % 100.912 100,00 %


Classe
Nature 1 2 5 Non classé Total général
Verger 29 43 1 2 75
Verger du presbytère


1 1
Total général 29 43 1 3 76

Qui est propriétaire des vergers ?

Professions / Statut Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Personnes physiques sans profession 18 23,68 % 37.630 37,29 %
Paysans (cultivateur et journalier) 41 53,95 % 33.760 33,45 %
Artisans 11 14,47 % 18.462 18,30 %
Autre profession 1 1,32 % 8.040 7,97 %
Métier d’autorité 3 3,95 % 2.050 2,03 %
Institution 1 1,32 % 600 0,59 %
Aubergistes — cabaretiers 1 1,32 % 370 0,37 %
Total général 76 100,00 % 100.912 100,00 %

La vigne

« Terme de botanique. […] Particulièrement, la plante à tige ligneuse et tordue qui porte le raisin. [xviii]» (Littré 1874)

Nature Nombre de parcelles cadastrales Superficie (m²)
Vigne 25 40.620

À la fin du 16e siècle, les vignobles de l’actuelle province de Luxembourg commencent à disparaître, concurrencés par le vin français de meilleure qualité. Le refroidissement climatique est une des raisons de son déclin.

La vigne est une plante grimpante cultivée pour son raisin avec lequel on fait notamment du vin. Elle se plaît dans des terrains calcaires, secs, chauds, en pentes et exposés au soleil. Sa culture nécessite un savoir-faire spécialisé. Les ceps sont plantés en ligne pour pouvoir les sarcler et biner avant la floraison.

Au 19e siècle, un microclimat favorable a permis son maintien dans deux villages gaumais. En 1828, le vignoble torgnolais d’une superficie de 4 hectares 45 ares est divisé en 28 parcelles [xix].

En 1844, son étendue s’est légèrement réduite, 3 hectares 86 ares et 23 parcelles. À Lamorteau, il existe deux vignobles d’une contenance totale de 23 ares.

La majorité du vignoble est planté au nord de la route Lamorteau-Épiez. Le vin produit de courte conservation était un petit vin rouge léger.

L’épidémie de phylloxera en 1890 décima les derniers vignobles.


Les foudres du clos de la Zolette en 2006.
(Torgny ; Luxembourg belge)

Clos de l’Épinette. (Torgny ; Luxembourg belge)

Après une complète disparition, elle a fait son retour à Torgny en 1955 avec une première vendange en 1959. La vigne fut plantée sur un terrain de 43 ares cédé par « la Zolette » la dame la plus âgée du village. Le vin prit le nom de « Clos de la Zolette ». La belle histoire tourna au vinaigre. Beaucoup plus de bouteilles que la vigne en était capable de produire furent vendues. À partir de 1985, l’affaire périclita. Les deux foudres et la vigne ont disparu. La buvette est devenue un hôtel à chauve-souris.

Sur une base nettement plus saine, trois nouveaux vignobles furent plantés. En 1986, 16 ares à lieu-dit à « la Fouchère ». En 1991, les coteaux du Poirier du Loup dont le raisin est pressé au centre du village, dans une cave voisine de l’église et du syndicat d’initiative. En 1996, le Clos de l’Épinette » le long de la route d’Épiez.

Le vignoble torgnolais a repris sa place symbolique, carte postale sympathique du village le plus au sud de la Belgique.


Le vignoble du Poirier du Loup. (Torgny ; Luxembourg belge)

Le vignoble du Poirier du Loup. (Torgny ; Luxembourg belge)

Classification fiscale


Classe
Nature 1 2 3 4 5 Total général
Vigne 1 3 8 9 4 25

Qui est propriétaire des vignes ?

Professions / Statut Nombre de parcelles cadastrales % Superficie (m²) %
Paysans (cultivateurs et journaliers) 16 64,00 % 24.050 59,21 %
Métier d’autorité 1 4,00 % 8.050 19,82 %
Artisans 6 24,00 % 5.380 13,24 %
Personnes physiques sans profession 1 4,00 % 2.650 6,52 %
Autre profession 1 4,00 % 490 1,21 %
Total général 25 100,00 % 40.620 100,00 %

Les cimetières

« Le lieu où l’on enterre les morts. [xx]» (Littré 1874)

Professions / Statut Nombre de parcelles cadastrales Superficie (m²)
Dampicourt 1 590
Montquintin 1 840
Rouvroy 1 600
Saint-Mard 1 960
Torgny 1 390
Vieux-Virton 1 750
Total général 6 4.130

Archives consultées

Archives de l’État à Arlon (Belgique)

  1. Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Cadastre du Royaume des Pays-Bas, Grand-Duché de Luxembourg, Bulletins des propriétés — 1822 : Dampicourt ; Montquintin et Couvreux ; Saint-Mard et Vieux-Virton.
  2. Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Administration du cadastre, Royaume de Belgique, Bulletins des propriétés — 1844 : Commune de Lamorteau (Lamorteau, Harnoncourt, Rouvroy et Torgny).
  3. Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Cadastre du Royaume des Pays-Bas, Grand-Duché de Luxembourg, Direction d’Arlon, Expertises des communes, 1819-1823 : Dampicourt ; Harnoncourt (Rouvroy et Lamorteau) ; Montquintin ; Saint-Mard ; Torgny.

Bibliographie

  1. BIANCHI, Serge ; BIARD, Michel, FORREST, Alan ; GRUTER, Édouard ; JACQUART Jean. La terre et les paysans en France et en Grande-Bretagne du début du XVIIe à la fin du XVIIIe siècle. Paris, Armand Colin, 1999. [p.51]
  2. GLOIRE, Laure ; FONTAINE, Justine. Bûcherons, sabotiers et Cie. Les métiers du bois. Weyrich édition, 2015. [p.171]
  3. JAONNES, Bernard. Et si Torgny m’était conté… Les éditions de la Joyeuserie, Dampicourt, 2000. [pp.175-181]
  4. LITTRÉ, Émile. Dictionnaire de la langue française, tome deuxième, D-H. Librairie Hachette, Paris, 1874 ; https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5406698m
  5. LITTRÉ, Émile. Dictionnaire de la langue française, tome quatrième, Q-Z. Librairie Hachette, Paris, 1874 ; https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54066991
  6. LITTRÉ, Émile. Dictionnaire de la langue française, tome troisième, I-P. Librairie Hachette, Paris, 1874 ; https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5460034d
  7. SAUCEROTTE, Constant. Petite agriculture des écoles, suivie d’éléments d’horticulture : Simples notions sur la culture des champs et des jardins, quatrième édition. Paris, Delalain frères, 1880. [pp.177-178]

Références

[i] Littré, t2, 1874, p.1374

[ii] Littré, t2, 1874, p.1374

[iii] Littré, t3, 1874, p.65

[iv] Littré, t3, 1874, p.172

[v] Expertise Harnoncourt, 1819-23

[vi] Expertise Dampicourt, 1819-23

[vii] Expertise Saint-Mard, 1819-23

[viii] Expertise Harnoncourt, 1819-23

[ix] Expertise Dampicourt, 1819-23

[x] Expertise Harnoncourt, 1819-23

[xi] Expertise Saint-Mard, 1819-23 ; Expertise Torgny, 1819-23

[xii] Expertise Dampicourt, 1819-23

[xiii] Expertise Saint-Mard, 1819-23

[xiv] Expertise Torgny, 1819-23

[xv] Expertise Montquintin, 1819-23

[xvi] Expertise Dampicourt, 1819-23

[xvii] Littré, t4, 1874, p.2454

[xviii] Littré, t4, 1874, p.2490

[xix]Joannes, 2000, p.175

[xx] Littré, t1, 1873, p.622