Carnets de notes - Territoire

Loi de Beaumont

Charte d’affranchissement

« La charte de Beaumont […] est pendant toute sa longue carrière une œuvre de délivrance et de réaction contre le régime féodal et ses institutions. Ce régime féodal a ravi la liberté à l’homme et à la terre. La charte restitue à l’homme son libre arbitraire et elle reconstitue la petite propriété, qui a disparu. [i]»

La loi de Beaumont-en-Argonne [1] est une charte d’affranchissement donnée en 1182 par Guillaume de Champagne, archevêque de Reims, aux habitants de la localité éponyme. Elle est inspirée des chartes de Laon, de Reims et de Bruyères.

L’archevêque dépouille les Beaumontais de leur état servile. Il leur accorde des libertés, les dote de coutumes et érige leur localité en ville neuve.

Godefroid Kurth affirme que les libertés communales sont plus anciennes que les chartes qui constatent et consacrent « une coutume bien antérieure [ii]» au terme d’une évolution insensible, sans violence.

Le droit de Beaumont servira de modèle aux chartes d’affranchissement à de nombreux bourgs et villages de l’actuelle province de Luxembourg belge, du nord des départements français des Ardennes et de la Meuse.

Godefroid Kurth écrit : « La loi de Beaumont est donc la seule en Belgique qui ait proclamé le principe de l’indépendance communale la plus large, je dirais presque la plus souveraine. [iii]»

Personnalité juridique des gens

Les chartes d’affranchissement accordent aux habitants des localités bénéficiaires une personnalité juridique. Tout en conservant des devoirs vis-à-vis de leur seigneur, ils sont libres, ils ont des droits.

Les affranchis sont francs-bourgeois. Cependant, par leur serment de fidélité, ils restent assujettis à quelques charges et devoirs modérés et définis.

La mainmorte est abolie. Les bourgeois sont pleinement propriétaires de leurs biens tant mobiliers qu’immobiliers. Ils en disposent et ont le droit de les léguer par testament. En contrepartie, ils doivent payer quelques rentes seigneuriales.

Bourgeois

Le bourgeois, habitant libre jouissant de certains privilèges, élit les officiers municipaux.

L’étranger qui s’établit dans la ville neuve peut acquérir moyennant certaines conditions et une faible contribution le titre de bourgeois. Il adresse sa demande au maire et aux échevins. Lorsqu’il l’aura obtenu, il bénéficiera des droits et privilèges rattachés à la charte d’affranchissement. Il participera à la gestion de la communauté.

Le candidat bourgeois doit résider depuis un an en la localité. Il doit être âgé de vingt-cinq ans, posséder la capacité voulue et justifier de bonnes vie et mœurs.

Dans le duché de Luxembourg et l’évêché de Verdun, lorsqu’un homme ne dépendant ni du prince ni de l’évêque épouse une bourgeoise d’une ville neuve, il est réputé bourgeois après un an et un jour.

« La Justice » : corps et pouvoirs communaux

Dans les localités affranchies à la loi de Beaumont, le seigneur « ne nomme ni les magistrats, ni les juges, ni les collecteurs d’impôts, ni les officiers ministériels ; il n’intervient ni dans l’administration de la ville, pour le contrôle, ni dans l’exercice de la justice, pas même pour choisir les juges. [iv]»

Le corps municipal composé d’un maire, d’échevins ou jurat et de l’assemblée des Hommes Quarantes, tous élus par les francs-bourgeois du lieu, est appelé la Justice ou les Gens de Justice, et quelquefois comme à la ville de Virton les Magistrats.

Suivant les usages de l’époque, la Justice cumule des pouvoirs administratifs, judiciaires et réglementaires. Il n’y a pas de séparation des pouvoirs comme dans nos démocraties contemporaines. Le maire et les échevins sont administrateurs, juges et officiers ministériels qui notamment enregistrent les contrats des particuliers dans des registres dénommés en duché de Luxembourg, œuvres de loi.

Assisté des Hommes Quarante, ils rédigent les règlements applicables à la communauté et aux étrangers séjournant dans le ressort de leur juridiction.

Le nombre de magistrats, influencé par l’importance de la population de la localité, est de sept, à savoir un maire et six échevins.

Quelques exemples dans le duché de Luxembourg [v] :

Les magistrats de la communauté font partie, toute proportion gardée, de l’élite des villes et villages. Ils sont choisis parmi les gens bien, les plus capables et irréprochables. D’une année à l’autre, ils peuvent être maires, échevins ou hommes quarante. Inévitablement, une année, ils n’auront aucun mandat.

Si dans la majorité des cas, la mairie est le ban et la justice d’une seule communauté, d’un seul village, elle peut être la mairie unique de plusieurs localités régies par la même charte d’affranchissement.

Maire et échevins

Le maire et les échevins gouvernent la communauté. Ils veillent à la police et au bon ordre. Ils rendent la justice.

Ils administrent les propriétés communales (aisances, bois…) et en assurent la conservation. Ils sont chargés de l’entretien des voiries. Ils réglementent l’usage des terres, bois, pâturages et eaux dans le finage. Dans les villes closes, ils maintiennent en bon état les portes et les remparts, et en organisent la garde. Ils reçoivent les nouveaux bourgeois.

En collaboration avec les Hommes quarante, ils édictent les règlements.

Le maire est nommé pour une année et après une année d’intervalle, il peut à nouveau exercer le mayorat pendant un an. Le maire, des communautés les plus défavorisées, doit prêtre un serment au prévôt de son ressort en présence des principaux habitants.

Si la coutume en usage le lui autorise, le maire désigne à son entrée en fonction les officiers subalternes de la ville, le doyen, le sergent, le maître d’école, les pâtres et messiers, les forestiers.

Le maire et les échevins sont rémunérés. Ils perçoivent une part dans les amendes, droit de mutation sur la propriété foncière, et droit d’entrée en bourgeoisie. Ils sont exceptés du droit de bourgeoisie.

Lieutenant-maire

Le lieutenant-maire désigné par le maire ou l’échevinage remplace le maire dans l’exercice de toutes ses attributions lorsque ce dernier est empêché. Il fait partie du corps des échevins.

Il est pris dans le corps des Hommes quarante. C’est une personne qui a l’expérience des affaires.

Conseil des quarante

Le conseil des quarante est l’assemblée des bourgeois du lieu qui assiste l’échevinage dans la gestion des affaires communales. Ensemble, ils décident « tout ce qui est utile et nécessaire au bien et à l’honneur de la ville. [vi]»

Dans le cas non prévu par la charte d’affranchissement, les Hommes quarante doivent décider selon l’esprit et la coutume de Beaumont.

Le conseil des quarante « est la pépinière des magistrats futurs et le cadre de réserve des anciens. [vii]»

Pouvoir judiciaire

« Les maire et échevin “ont cour et connaissance de tous bourgeois et de tous cas survenus en la ville et finage” ; ils ont pouvoir de statuer sur toutes causes réelles et personnelles, sans avoir recours à des juges supérieurs, sans aller quérir droit ou conseil près des maîtres de la loi, soit à Beaumont, soit au chef-lieu de la prévôté. Ils possèdent en un mot haute, moyenne et basse justice. [viii]»

La qualité de justicier est la charge la plus importante attribuée aux maires et échevins qui sont à la fois témoins rapporteurs, sergents, huissiers, officiers de police, de notaires et juges.

En leur qualité d’officier de police, le maire et les échevins dressent les procès-verbaux des contraventions et délits.

Civil : enregistrement des actes

Le maire et les échevins enregistrent dans les registres municipaux — registres d’œuvres de lois — les actes authentiques conclus par les bourgeois (contrats translatifs de propriété, hypothèques, procurations…) qui ne deviennent exécutoires qu’après avoir « expédiés sous le sceau particulier de la ville. »

Justice criminelle

En matière criminelle, la compétence de la justice locale est très étendue. Elle est un tribunal de simple police, un tribunal correctionnel et une cour d’assises. Elle sanctionne les infractions, délits ou crimes par les bourgeois et les étrangers dans son ban.

Dans les plus petites communautés, nombre de maires et échevins se sont dessaisis de la moyenne et haute justice au profit des juridictions prévôtales. Ils ne conservèrent que les affaires de polices, champêtres et forestières.

Une évolution normale : la réduction du pouvoir judiciaire des communautés

En 1623, dans le duché de Luxembourg, l’échevinage est réduit à une juridiction de premier degré.

En 1681, une déclaration du roi de France oblige les officiers municipaux de l’ancien comté de Chiny annexé à prendre conseil à Montmédy après avoir instruit les affaires et rendre leur sentence conformément à l’avis reçu.

Renouvellement des magistrats

Annualité

Le renouvellement annuel des magistrats par élection singularise le droit de Beaumont. Les bourgeois du ressort les choisissent. Privilège extraordinaire, les seigneurs n’ont pas voix au chapitre.

Les rares communautés qui ne la pratiqueront pas tendront à acquérir ce droit. En 1609, Châtillon remplace sa justice viagère par des magistrats élus annuellement.

Électeurs

Le droit de Beaumont a instauré une forme de suffrage presque universel. Les bourgeois élisent les magistrats, maires et échevins de la communauté villageoise. Seulement, cette communauté est une réunion des familles et non d’individus. Le droit de délibérer et de voter sur les affaires communales appartient au chef de famille à savoir suivant nos us et coutumes aux pères de famille. Il n’était pas concevable qu’un fils puisse émettre un vote contradictoire à celui de son père. Dans le cas présent, le terme famille se définit comme le foyer, la maison. Lorsqu’il s’établit dans sa propre demeure, le fils devient chef de son propre foyer et électeur.

Cet état de fait n’est pas écrit dans la loi et les chartes. « Les femmes célibataires et les veuves [quand elles sont à la tête d’un ménage peuvent] jouir d’un certain droit de vote dans les questions pour lesquelles l’intervention de tous les ménages était requise. [ix]» Dans les registres de Saint-Léger — duché de Luxembourg —, plusieurs résolutions signées par les chefs de famille le sont par des femmes [x].

Élection

Traditionnellement, les communautés affranchies à la loi de Beaumont élisaient leurs magistrats le dimanche de la Pentecôte [2].

Pour limiter les intrigues, réduire le risque de cabale et les animosités, le scrutin est indirect et sans candidature personnelle. Il ne peut y avoir corruption, intimidation ou promesses.

À Beaumont-en-Argonne, il y a trois degrés d’élection :

  1. La communauté de bourgeois désigne deux électeurs. Les magistrats — maire et échevins — en désignent deux autres.
  2. Les quatre électeurs après avoir prêté serment entre les mains du maire sortant nomment huit électeurs, bourgeois irréprochables, non parents, ni alliés.
  3. Après avoir prêté serment entre les mains du maire sortant, les huit bourgeois-électeurs nomment le maire et les sept échevins.

Le nouveau maire prête serment entre les mains de l’ancien maire. Les nouveaux échevinsprêtent serment entre les mains du nouveau maire.

L’élection au suffrage indirect à trois degrés est un système complexe démontrant une bonne maîtrise de la vie politique par la communauté des habitants. Cependant, tant en Champagne, Lorraine et Luxembourg, plusieurs villes neuves simplifient le scrutin qui passe à deux degrés.

À la fin de l’ancien régime, le renouvellement des magistrats de ville de Virton — comté de Chiny, duché de Luxembourg — est un mélange de suffrages universels et indirects.

Le maire est élu « par l’universalité des bourgeois. [xi]»

La désignation des échevins est plus ardue :

  1. Les deux premiers échevins sont nommés par les Hommes quarante et choisis au sein de leur conseil. Ce sont donc d’anciens magistrats.
  2. Les deux suivants sont les deux derniers échevins de la justice sortants. Ils entrent de plein droit dans la nouvelle justice.
  3. Les derniers échevins (5e et 6e) sont choisis par la communauté parmi les novices, les bourgeois qui n’ont exercé aucune magistrature communale.

Les magistrats sortants devenaient Homme quarante.

L’annualité et la non-reconduction des mandats provoquaient un renouvellement constant de la magistrature municipale, mais le nombre de bourgeois capable était limité. En conséquence, un magistrat était rééligible à une fonction plus élevée ou après une année sans mandat.

Godefroi Kurth présente un cas d’abus à Vance au milieu du 18e siècle. La fonction de maire y était devenue héréditaire. « Voilà trente ans que je suis à Vance, écrit [un] témoin, et il n’y en a qu’un seul qui soit parvenu à être maire, car il n’y a que deux familles qui se partagent la mairie [xii]».

Pour éviter cette situation, dans un règlement daté du 31 mai 1352, la ville de Virton défendait à « chaque magistrat de rester en fonction plus d’une année, ainsi qu’aux électeurs d’élire deux années la même personne. [xiii]»

Grief contre le droit de Beaumont

Si lors de leur octroi les chartes d’affranchissement sur le modèle de celle de Beaumont-en-Argonne sont un progrès accordant une personnalité juridique aux habitants des villes neuves, le droit de propriété, des droits politiques, l’application du droit de Beaumont n’était pas exempte de défauts. Sans une population instruite, lettrée, il n’y a pas de démocratie viable et de justice équitable.

Les opposants au droit de Beaumont — états, prévôts, conseil privé, gouverneurs — formulent plusieurs griefs.

Absence de compétence : « Les élus sont souvent des hommes incapables, ignorants, nullement à la hauteur de leur mission. [xiv]»

Annualité : L’exercice annuel des fonctions municipales ne permet pas de réaliser les entreprises utiles. De mauvaise foi, ils considèrent que cela ne permet pas au magistrat élu d’acquérir l’expérience des affaires. Cet argument doit être rejeté, car avant d’être maire, le bourgeois novice a été plusieurs années échevin.

Fraude électorale : En quelques endroits, il y a eu des abus. Certaines familles ont monopolisé les charges communales. Dans le duché de Luxembourg, en 1746, une ordonnance «  impose aux maires et échevins l’obligation de prêter serment de n’avoir pas acheté les suffrages et qu’en 1748 un maire refuse de prêter ce serment à cause de son indélicatesse et de sa déloyauté ! [xv]»

À cela, ajoutez les reproches péjoratifs : « Dans les villes neuves du Luxembourg, les élections faites par avance dans les cabarets […] parmi les coqs de village amènent au pouvoir des hommes sans instruction, sans fortune, sans probité, sans prud’homie ; elles causent des désordres et des divisions ; en devenant la principale préoccupation des esprits, elles font prendre des habitudes de paresse et d’ivrognerie. [xvi]»

Atteinte au doit de Beaumont

Indépendamment des griefs exposés ci-dessus, l’atteinte au droit de Beaumont reflète l’évolution politique des états européens qui d’une société féodale deviennent des états centralisés.

La diffusion du droit de Beaumont atteint son apogée au 15e siècle. Insensiblement, les souverains de Champagne, Lorraine et Luxembourg amoindrissent les droits politiques, les restreignent, les dénaturent. Et au terme de ce processus, ils les abrogent.

Du 16e au 18e siècle, les confirmations des franchises deviennent de plus en plus rares.

Malgré tout, l’abrogation progressive des chartes d’affranchissement est partielle. Elle ne concerne que l’organisation des communautés d’habitants et la justice. Les droits des gens sont préservés. Ils restent libres, gardent une personnalité juridique, conservent le droit d’être propriétaire.

Champagne (Royaume de France)

Après la guerre de Cent Ans, les monarques français instaurent progressivement une monarchie absolue. Ils imposent leurs autorités dans le domaine financier (impôt). Pour asseoir leurs pouvoirs sur la bourgeoisie, ils doivent contrôler les institutions municipales et réduire la puissance des justices locales.

La plénitude de juridiction en matière civile et criminelle des communautés affranchies est remise en cause. Le pouvoir central constate que « dans les campagnes en particulier, le niveau de la justice s’abaisse avec l’infériorité du suffrage universel. Les bons esprits et les États réclament, pour protéger efficacement les intérêts, des juges plus éclairés et plus indépendants. [xvii]» Les agents royaux doivent instruire les affaires. Dans beaucoup de villes neuves, la justice est réduite dans le meilleur cas à une juridiction de première instance avec appel aux Parlements de Paris. Elle peut être réduite à une simple juridiction foncière.

Le nouveau pouvoir judiciaire et législatif tend à substituer aux coutumes locales la coutume générale du pays. Les lois anciennes ne sont pas abrogées, elles sont passées sous silence.

Par voie d’ordonnance du 16e au 18e siècle, le pouvoir royal prive les représentants des communautés de tout pouvoir, il les prive de leur droit électoral. Il réduit au statut d’agent royal les maires et échevins.

Lorsqu’elle existe encore, les élections sont un simulacre. Un ordre du roi ou une lettre de gouverneur désignent le candidat pour lequel les bourgeois doivent voter. Le maire est désigné par le Roi. Il ne gère pas la municipalité, il n’a qu’un rôle de police. En 1778 et 1779, l’intendant de Champagne désigne les douze notables de Beaumont chargé d’administrer la commune avec un procureur-syndic.

Les gruyers accaparent au détriment des échevins la gestion des bois et forêts. « Aménagement, délivrance des bois pour maisonnement, chauffage ou clôtures, défrichements et enlèvement de bois mort sont de leur ressort et ne se font plus qu’avec leur autorisation ou à des jours déterminés. [xviii]»

Par suite de l’entrée de la France dans la guerre de Trente Ans, les bourgeois sont soumis à des obligations militaires. Au terme d’une ordonnance de 1639, à l’approche de l’ennemi, ils doivent s’assembler en armes et lui résister.

Duché de Lorraine

En raison du conflit entre les rois de France et le duc de Lorraine, le duché de Bar sera occupé par la France et en subira l’influence. « Sur l’ordre de Louis XIII, une municipalité nommée remplace à Stenay (1635) la municipalité élue, et les quarante, réduits déjà à deux, disparaissent. À Longuyon, à Othe, à Souilly, à Lomerange et ailleurs, les offices de maire sont vénaux et se transmettent en survivance (1605, 1614, 1629, 1631, 1649). [xix]»

En Lorraine, le droit de Beaumont sera particulièrement attaqué. Les prévôts seigneuriaux s’immiscent dans les élections. D’après un arrêt rendu en 1701 par la cour de souveraine de Nancy portant sur le village de Frouard, ils ont voix délibérative. Insensiblement, les prévôts accaparent les principales compétences municipales.

En 1738, le duc Stanislas confie la gestion des biens communaux à ses officiers. En 1771, le roi Louis XV supprime les élections. Les offices municipaux sont supprimés. Il en crée de nouveau qui sont vendu plus cher (vénalité des offices).

Comme en France, les forêts passent sous le contrôle des gruyers. Les justices locales deviennent des juridictions de première instance avec appel aux cours souveraines de Metz ou de Nancy.

Le duc Charles III publie un édit en 1595 qui oblige les bourgeois à se rassembler armés à la vue de l’ennemi pour se défendre. À Nancy, le guet est obligatoire.

Duché de Luxembourg

Le régime communal établi par le droit de Beaumont, certes réformé par Philippe d’Espagne, s’y maintient plus longtemps qu’en Champagne et Lorraine. Comme dans ces deux régions, les justices locales sont devenues des juridictions de première instance avec appel aux cours supérieures ou de simple juridiction foncière.

Les prévôts d’Arlon et de Virton–Saint-Mard « entrent en lutte contre les communautés wallonnes de leur ressort, qui défendent vaillamment leurs privilèges. [xx]» En 1613, les habitants de Châtillon démontrent le mal fondé des prétentions du prévôt d’Arlon. Les échevinats de Saint-Léger en 1697, 1718 et 1746, de Rachecourt, de Mussy-la-Ville, d’Halanzy en 1746 subissent leurs attaques tout comme Buzenol, Étalle et Sainte Marie.

En 1741 et 1758, par des lettres de patente, l’impératrice Marie-Thérèse d’Autriche (1717-1780) confirme à ces communautés le droit de renouveler leur justice chaque année.

Mais le processus d’abrogation du droit de Beaumont était largement entamé. Les franchises disparaissaient les unes après les autres. Les prévôts, le conseil du Luxembourg, le conseil privé ne pouvaient tolérer que les autorités locales élues ne relèvent pas immédiatement de Sa Majesté qui n’y ait rien à dire. Ils contestaient l’authenticité de la loi de Beaumont et qualifiaient les droits séculaires d’abus intolérables. Hautainement, ils prétendaient que les communautés ne comprenaient rien à leurs franchises. Eux seuls étaient aptes à les interpréter d’une manière saine.

Par un édit daté du 3 mai 1775, l’impératrice duchesse Marie-Thérèse d’Autricheabroge le renouvellement annuel des justices dans son duché de Luxembourg.

Le dernier vestige démocratique du droit de Beaumont n’est plus.

Articles connexes

  1. Coustumes, franchises et droits de la ville de Beaumont.
  2. Philippe Saint-Mard (1705-1798 ; échevin et maire).

Bibliographie

  1. BONVALOT, Édouard. Le tiers état d’après la charte de Beaumont et ses filiales. Paris – Nancy – Metz, Alphonse Picard – Sidot Frère, 1884 ; https://www.google.be/books/edition/Le_tiers_%C3%A9tat_d_apr%C3%A8s_la_charte_de_Bea/8bDSAAAAMAAJ?hl=fr&gbpv=1&dq=%22loi%20de%20beaumont%22&pg=PR5&printsec=frontcover
  2. DEFOURNY, l’Abbé (DUFOUR, Pierre). La loy de Beaumont. Coup d’œil sur les libertés et les institutions du moyen-âge. Reims, P. Dubois, 1864 ; https://www.google.be/books/edition/La_loy_de_Beaumont/DXJCAAAAIAAJ?hl=fr&gbpv=1&pg=PA3&printsec=frontcover
  3. KURTH, Godefroid. La loi de Beaumont en Belgique. Étude sur le renouvellement annuel des justices locales. Bruxelles, F. Hayez, 1881 ; https://www.google.be/books/edition/La_loi_de_Beaumont_en_Belgique/IspnOfzQb_AC?hl=fr&gbpv=1&pg=PP1&printsec=frontcover

Liste chronologique des lieux affranchis à la charte de Beaumont

Établie par Édouard Bonvalot [xxi] :

Lieux affranchis dont la charte est inconnue

Établie par Defourny, Jeantin, Van Werveke, et Abel [xxii] : Audun le Roman, Autruche, Autrutebas, Aubange, Anselbourg, Ametz, Allonville, Allancourt, Boimont, Buray, Colombe, Gorcy, Glaba (Glaba, Autrui et Lafosse sont des écarts de la commune de Mont Saint Martin), Gortdrange, Heumont, La Rimont, Lexy ou Lussey, La Malmaison, Méchy, Mezembach, Moulins devant Mouzon, Niépers, Ornimont, Ottange, Piédmont, Putlange, Pulventeux, Sponberg, Herserange, Rodange, Raon, Ratincourt, Sepfontaines, Saint Pancray, Tourgny, Tréfort, Villers, Villamy, Ville au Montois, Froidos dit Berthaucourt, Nantillois, Areis ou Lions, Bantheville, Bolandre, Bouru, Bouvigny, Brandeville, Dompremy la Canne, Fontaine, Inor, Iray le Sec, Juvigny, La Loye, Landzécourt, Lini devant Dun, Louppy, Martincourt, Murvaux, Nouillompont, Pouilly, Remoiville, Rupt sur Othain, St Laurent les lon Villers, Villers devant Dun, Villers devant Marville, Hans devant Marville, Wittarville, Hayange, Fontoy, Broville sur Meuse.



Notes

[1] France, Grand-Est, département des Ardennes arrondissement de Sedan.

[2] 7 semaines après le dimanche de Pâques. La date de l’élection varie d’une année à une autre.



Références

Références générales

  1. Charte d’affranchissement : Bonvalot, 1884, pp.120-121, et 554 ; Defourny, 1864, p.32 ; Kurth, 1881, pp.3-4, et p.6.
  2. Personnalité juridique des gens : Bonvalot, 1884, pp.120-121, p.124, et p.301.
  3. Bourgeois : Bonvalot, 1884, p.38, pp.120-121, et pp.318-320.
  4. « La Justice » : corps et pouvoirs communaux : Bonvalot, 1884, p.122, p.369, p.379, p.380, p.385, pp.388-389, et pp.404-405 ; Defourny, 1864, p.33, p.37, et p.39 ; Kurth, 1881, p.7.
  5. Maire et échevins : Bonvalot, 1884, pp.120-121, p.123, pp.386-388 ; Kurth, 1881, pp.10-11, et 27.
  6. Lieutenant-maire : Bonvalot, 1884, p.379 ; Kurth, 1881, p.30.
  7. Conseil des quarante : Bonvalot, 1884, pp.123-124, pp.409-410 ; Defourny, 1864, p.40.
  8. Pouvoir judiciaire : Bonvalot, 1884, pp.389-390.
  9. Civil, enregistrement des actes : Bonvalot, 1884, p.123, et pp.390-391
  10. Justice criminelle : Bonvalot, 1884, p.394-395, et 397.
  11. Une évolution normale, la réduction du pouvoir judiciaire des communautés : Bonvalot, 1884, p.393.
  12. Annualité : Kurth, 1881, p.4 et p.8.
  13. Électeurs : Bonvalot, 1884, p.373 ; Defourny, 1864, p.38 et 379 ; Kurth, 1881, p.14.
  14. Élection : Defourny, 1864, p.46, pp.372-373, pp.375-377 ; Kurth, 1881, pp.9-12, pp.15-17, pp.19-20, p.20.
  15. Grief contre le droit de Beaumont : Bonvalot, 1884, pp.551-552 ; Kurth, 1881, p.33.
  16. Atteinte au droit de Beaumont : Bonvalot, 1884, p.528, pp.556-557 ; Kurth, 1881, p.34.
  17. Champagne (Royaume de France) : Bonvalot, 1884, pp.529-539
  18. Duché de Lorraine : Bonvalot, 1884, p.531, p.539, pp.532-533, pp.541-542, pp.548-549.
  19. Duché de Luxembourg : Bonvalot, 1884, p.529, p.536, p.550, pp.552-553 ; Kurth, 1881, pp.31-33.

Références particulières

[i] Bonvalot, 1884, p.554.

[ii] Kurth, 1881, p.3.

[iii] Kurth, 1881, p.6.

[iv] Defourny, 1864, p.33.

[v] Kurth, 1881, p.7.

[vi] Bonvalot, 1884, p.123.

[vii] Bonvalot, 1884, p.409.

[viii] Bonvalot, 1884, p.393.

[ix] Kurth, 1881, p.14 (Note de bas de page).

[x] Ibidem.

[xi] Kurth,1881, p.19.

[xii] Kurth,1881, p.9.

[xiii] Kurth,1881, p.9.

[xiv] Kurth,1881, p.33.

[xv] Bonvalot, 1884, p.552.

[xvi] Bonvalot, 1884, p.551.

[xvii] Bonvalot, 1884, p.535.

[xviii] Bonvalot, 1884, pp.532-533.

[xix] Bonvalot, 1884, p.539.

[xx] Bonvalot, 1884, p.550.

[xxi] Bonvalot, 1884, pp.247-251.

[xxii] Bonvalot, 1884, p.246.