Carnets de notes - Des familles

Les déboires de Jean-Baptiste Noël dit Babisse

Jean Baptiste Noël dit Babisse est né le dimanche 24 avril 1836 à Dampicourt (province de Luxembourg, Belgique). Il est le fils légitime de Pierre Joseph Noël (1802-1878), maçon, âgé de 34 ans et de Jeanne Marguerite Guillaume (1805-1871), âgée de 30 ans.

Anne Chenet, son épouse, est née le 3 octobre 1844 à Ruette (province de Luxembourg, Belgique).

Le couple se marie le 6 février 1884 à Harnoncourt (commune de Lamorteau, province de Luxembourg, Belgique).

Le couple n’a pas d’enfant.

Fond de carte : OpenStreetMap contributors under ODbL – Umap (https://umap.openstreetmap.fr).

Son statut social et son patrimoine

Dans les archives familiales, nous croissons Jean-Baptiste Noël dit Babisse dans des transcriptions de jugements, des actes de ventes forcées et des exploits d’huissiers. Si nous avons documenté le parcours de son frère aîné Joseph émigré au Québec, nous n’avons effectué aucune recherche sur lui. Dans la seconde moitié de sa vie, Babisse se trouve dans une situation financière catastrophique. Nous n’avons aucun élément permettant de comprendre sa déconfiture, nous pouvons tout au plus survoler cinq années de procédure se terminant par une saisie immobilière et la vente aux enchères de son patrimoine le 31 août 1885.

La copie du procès-verbal de cette vente publique jointe à l’ordonnance du tribunal de première instance d’Arlon du 25 janvier 1888 est le seul inventaire à notre disposition. À cette époque, le couple Noël-Chenet est domicilié à Harnoncourt. Jusqu’en 1883, il habitait Dampicourt où sont situés tous ses biens excepté une maison sise à Virton, rue Saint-Escarmelle.

Nature Surface Pourcentage
Terre 3 ha. 23 a. 35 c. 56,50 %.
Pré 2 ha. 42 a. 70 c. 42,40 %.
Jardin 4 a. 90 c. 0,86 %
Maison 1 a. 40 c. 0,24 %
  Total général 5 ha. 72 a. 35 c. 100,00 %

Dans les années 1822-1844, en moyenne, les agriculteurs étaient propriétaires d’un domaine de 5 hectares et demi. 74,75 % de ceux-ci cultivaient en propre moins de 5 hectares. Dans la région, le seuil d’aisance c’est-à-dire celui à partir duquel l’exploitant pouvait nourrir sa famille sans exercer une profession annexe était de 6 à 8 hectares. À Dampicourt, 74,18 % de la surface agricole utile était occupée par les terres labourables et 25,82 % par les prairies.

En 1885, Jean-Baptiste était âgé de 49 ans. La nature des biens repris ci-dessus est celle d’un agriculteur ayant vraisemblablement une activité complémentaire (journalier ou artisan). Il n’est pas automne. Il a peut-être déjà vendu une partie de ses propriétés. Nous n’en savons rien.

Son exploitation est déséquilibrée. Proportionnellement, il ne possède pas assez de terres labourables.  

La voie de l’indigence

Le 8 novembre 1883, Jean-Baptiste Noël est condamné à payer à maître Lambinet, notaire à Virton, la somme de 53 francs 25 centimes « pour la part lui incombant au défendeur tant en nom personnel que comme cessionnaire des droits des légataires Jean-Baptiste Noël de Monternez et Marie-Victoire Noël, époux Demard de Couvreux, dans les déboursés et honoraires du testament d’Anne-Virginie Guillaume, reçu par le ministère de demandeur le 9 octobre 1873. » En vertu dudit testament, Jean-Baptiste Noël est légataire des droits immobiliers d’Anne-Virginie Guillaume pour un neuvième et par acquisition de la moitié d’un neuvième de ceux de ses enfants. En sus, il est condamné aux intérêts judiciaires et aux dépens liquidés à 79 francs 82 centimes.

Le 20 juin 1884, Jean-Baptiste Noël dit Babisse, demeurant à Harnoncourt, est condamné par défaut à honorer une somme de 111 francs à Joseph Lefebvre, huissier des tribunaux, qu’il lui doit « pour frais de différents exploits notifiés à sa requête et argent avancé pour lui ; en autre aux intérêts judiciaires et aux dépens. » Il doit payer « les intérêts légaux à partir du 18 juin 1885, jour de la demande en justice et les dépens liquidés à 12 francs 50 centimes, non compris la minute du présent jugement. »

Jean-Baptiste Noël doit au notaire Lambinet la somme de 221 francs 70 centimes et à maître Netzer, avoué du poursuivant, la somme de 431 francs 53 centimes. Le 12 août 1885, le tribunal de première instance séant à Arlon déclare régulière et valable la saisie réelle faite à la requête du dit monsieur Lambinet — notaire à Virton —, sur le sieur Jean-Baptiste Noël dit Babisse et son épouse Anne Chenet

Dans le cahier des charges de la vente, une condition précise qu’aucun adjudicataire ne pourra se prévaloir de son titre de créancier des époux Noël-Chenet pour apposer la compensation. Cela laisse entendre l’existence de nombreux créanciers. La clause prévoit une « distribution des deniers provenant de la présente vente, sans préjudice toutefois aux privilèges et hypothèques qui pourraient exister sur les immeubles par eux acquis. » Les cocréanciers de Jean-Baptiste Noël ne s’accorderont pas sur la répartition des prix d’adjudication. Un juge-commissaire sera commis par le président du tribunal de première instance du siège d’Arlon pour procéder à l’ordre judiciaire suivant l’ordonnance rendue le 5 janvier 1888.

Le 31 août 1885, la vente publique des biens du couple rapporte une somme de 17.991 francs. Nous en connaissons le détail analysé ci-dessus par une copie de son procès-verbal annexée à l’ordonnance du 25 janvier 1888 rendue par le juge Waxweiler du tribunal de première instance d’Arlon.

Au mois de novembre 1885, les huissiers de justices procèdent à plusieurs exploits et saisies-arrêts :

  1. Le 3 novembre, l’huissier Adolphe Frédéric Glouden effectue une saisie-arrêt sur les sommes déposées à la Caisse des Dépôts et Consignations et provenant du prix des emprises faites dans des propriétés appartenant au débiteur défaillant Noël pour l’établissement du chemin de fer Virton-Montmédy, et sur le prix des immeubles acquis par les autres tiers saisis à la vente sur expropriation forcée à charge de même Noël, suivant procès-verbal avenu devant maître Foncin, notaire à Virton, en date du 31 août 1885. Cette saisie-arrêt est faite pour sûreté et avoir paiement de la somme de 111 francs (montant en principal de la condamnation du 20 juin 1884), des intérêts à partir du 18 juin 1884, de la somme de 48 francs 30 centimes (montant des frais liquidés au dit jugement, coût de son expédition, de sa signification et d’un commandement) et des intérêts de cette somme à partir du 3 novembre 1885. Auquel s’ajoutent les frais de la présente saisie-arrêt et de ses suites évaluées approximativement à 500 francs, sans préjudice de tous autres dus, droits et actions du requérant.  
  2. Le 3 novembre, le même huissier signifie une saisie-arrêt pour sûreté et avoir de la somme de 53 francs 25 centimes pour le principal, des intérêts légaux à partir du 24 décembre 1881, de la somme de 153 francs 85 centimes pour dépens liquidés au jugement du 8 novembre 1883 (succession de Jean-Baptiste Noël de Monternay et Marie Victoire Noël, épouse Demars de Couvreux) et 500 francs pour les frais de la saisie-arrêt et des suites de celle-ci, sans préjudice de tous autres dus. Par exploits, les adjudicataires de la vente du 31 août 1885 sont informés qu’ils devront payer leur adjudication dans les mains du notaire Fontaine et « tout paiement en d’autres mains étant considéré comme nul. »
  3. Le 6 novembre, l’huissier Glouden procède à une saisie-arrêt consécutive au jugement du 20 juin 1884 précité. Le requérant donne assignation à Jean-Baptiste Noël, à comparaître après l’expiration du délai légal (8 jours) à 9 heures du matin devant le tribunal de première instance à Arlon pour « entendre ordonner que les sommes dont les tiers saisis se reconnaîtront ou seront jugés débiteurs envers le saisi seront par eux versées à la décharge de ce dernier entre les mains du requérant jusqu’à concurrence ou en déduction » de sa dette. La saisie-arrêt est signifiée au conservateur des hypothèques à Arlon et aux adjudicataires de la vente publique du 31 août.
  4. Le second exploit du 6 novembre 1885 de l’huissier Glouden pour le compte de l’huissier Lefebvre est une dénonciation avec validité, au sieur Jean-Baptiste Noël, dit Babisse, sans profession, demeurant à Harnoncourt ; de la saisie-arrêt pratiquée à sa charge entre les mains des notifiés (les mêmes que dans le premier exploit à l’exception de Constant Protin Conservateur des hypothèques). Les tiers saisis (les adjudicataires) devront comparaître devant le tribunal de première instance d’Arlon pour faire au greffe du dit tribunal la déclaration des sommes qu’ils doivent ou devront au défendeur saisi (Babisse), sinon faute de se faire dans ledit délai, s’entendre déclarer débiteurs purs et simples des causes de la saisie-arrêt dont s’agit et comme tels condamnés à payer au requérant, à la charge du saisi Noël la somme de 111 francs (principal) et les intérêts courant à partir du 18 novembre 1884 ; la somme de 48 francs 30 centimes et les intérêts courant à partir du 3 novembre 1885 ; ainsi que les frais de saisie, de l’instance en validité et en déclaration.
  5. Le 26 novembre 1885, par exploit de l’huissier Glouden, André Joseph Hyppolite Lambinet, notaire à Virton, procède de la même manière que l’huissier Lefebvre.

Cette succession des saisies-arrêts nous incite à penser que la vente forcée des biens du couple n’a pas permis d’assainir complètement sa situation financière.

Le 24 mars 1887 à la demande de Catherine Lambinet veuve Josset, négociante domiciliée à Virton, « créancière du défendeur Jean-Baptiste Noël, dit Babisse, d’une somme de 409 francs 25 centimes, montant en principal, intérêts et frais des condamnations portées audit jugement ; [et d’une] somme de 253 francs 7 centimes pour frais d’une instance en nullité d’un acte de donation entre vifs fait au profit de l’épouse du dit sieur Noël », le tribunal de première instance d’Arlon charge le notaire Fontaine de Virton procédera à la vente par licitation de la parcelle indivise no 1359 de la section C du cadastre de Dampicourt sous la surveillance du juge Waxweiller. La part du prix de la vente revenant à Babisse « sera attribuée à la demanderesse, à concurrence ou en réduction de sa créance en principal, intérêts et frais. »

Les deux autres copropriétaires sont Jean-Baptiste Saint-Mard–Saint-Mard de Dampicourt et Joseph Dupont, domestique demeurant à Saint-Mard. Jean Baptiste Noël avait tenté pour une dernière fois de contester leurs droits de propriété, mais dans ses motivations, la cour avait constaté « qu’il y a chose jugée sur la question de la copropriétaire de la prairie litigieuse. » « Le tribunal sans s’arrêter à l’offre de preuve du défendeur Noël, laquelle est rejetée comme irrélevante et inutile, déclare le dit défendeur mal fondé en sa fin de non-recevoir et statuant au fond, le condamne à procéder avec ses codéfendeurs à la poursuite et diligence de la demanderesse, à la vente par licitation de l’immeuble ci-dessus désigné, pour le prix à en provenir, être partagé entre les parties selon les droits. »

La vente publique a lieu le 30 mai en la demeure de monsieur Cuvelier, débitant à Dampicourt, en l’absence de Jean-Baptiste Noël dit Babisse. Jean-Baptiste Saint-Mard–Saint-Mard, covendeur pour un huitième, achète la parcelle pour un prix principal de 810 francs dont 607 francs et 50 centimes (six huitièmes) reviennent à la créancière-demanderesse. Le produit de la vente est insuffisant pour apurer la dette [1].

Dans les archives familiales, nous trouvons un dernier exploit d’huissier daté du 21 février 1888. L’huissier Glouden se rend au domicile de Jean-Baptiste Auguste Saint-Mard, Alphonse Saint-Mard-Stasser, Jean-Baptiste Saint-Mard, créancier de Noël, dit Babisse. Il agit pour compte du notaire André Joseph Hippolyte Lambinet, notaire à Virton.

En vertu de l’ordonnance du 25 janvier 1888 se rapportant à la vente publique du 31 août 1885, les créanciers de Jean-Baptiste Noël doivent « produire dans le mois à dater de ce jour entre les mains de monsieur le Juge commissaire, au greffe du tribunal [...], au palais de justice d’Arlon, leurs titres de créances sur Jean-Baptiste Noël, dit Babisse, sans profession, demeurant à Harnoncourt, avec à la clé de procédure signée de leur avoué et contenant demande en collocation du dit ordre. Pour déclarant que faute de se faire dans le délai fixé, leurs créances ne seront pas comprises dans l’état de collocation. »

Babisse ne s’en est pas sorti. Le 7 juin 1894, Jean-Baptiste Saint-Mard — bourgmestre de la commune de Dampicourt — signe une déclaration d’indigence. Jean Baptiste Noël, âgé de 58 ans, « né le 23 avril 1836, de nationalité belge, sans profession, domicilié à Virton, mais résident à Dampicourt, n’a pas d’enfant et n’habite pas avec son épouse, et n’a que les aumônes qu’on lui fait. »

En juin 1894, par-devant la justice de paix de Virton, Jean-Baptiste Noël a demandé réparation. Auguste Themelin, employé au chemin de fer, Camille Ricaille, journalier, Louis Renson enfant mineur, Julien Saint-Mard enfant mineur et Eugène Berque enfant mineur se sont permis « d’exercer des violences sur sa personne et de lui lacérer ses vêtements, ainsi qu’il est constaté par un jugement du tribunal de police de Virton, en date du vingt-quatre février dernier, violences qui, outre les souffrances qu’elles ont occasionnées, ont produit une incapacité de travail de plusieurs semaines à l’exposant ; que toutes les démarches tentées jusqu’ici pour obtenir un règlement amiable sont demeurées vaines. » Il demande le bénéfice du pro Deo et est admis à la procédure gratuite par jugement du tribunal de paix de Virton en date du trente juin 1894. À titre de dommages et intérêts, Babisse réclame 300 francs. Le juge accorde une indemnité à 10 francs.

Les emprises du chemin de fer

Indemnités d’expropriation

En vertu d’un arrêté royal du 1er décembre 1866, le gouvernement belge est autorisé à concéder l’exploitation d’un chemin de fer reliant la ligne Namur-Arlon à la frontière française (Lamorteau - Écouviez) et passant par Virton. [2] La concession avait été accordée à la S.A. « Compagnie Thénevet » dite « Compagnie du chemin de fer de Virton » qui avait été nationalisé en 1880 à la suite de difficultés financières. [3]

La construction des 40 kilomètres de voie unique fit disparaître de nombreuses servitudes et commodités. Il y a eu de diverses entraves lors des expropriations.

Le jugement du 15 février 1883 rendu par le tribunal de première instance de l’arrondissement d’Arlon en est un exemple, mais à la cause principale se greffe un problème secondaire, une contestation de propriété sur une des trois parcelles.

Les expropriés-défendeurs se divisent en deux groupes.

Le premier formé de Jean-Baptiste Noël dit Babisse, Georges Noël, Joseph Noël agissant en son nom et pour ses filles Jeanne-Catherine et Marie-Virginie Noël et Jean-Baptiste Noël.

Le deuxième comprenant Alphonse Saint-Mard-Stasser, Jean-Baptiste Saint-Mard, Anne-Julie-Virginie Saint-Mard, Clémentine-Agathe Saint-Mard, Marie-Joséphine Saint-Mard, Jean-Baptiste Auguste Saint-Mard, Nicolas Genin, et la commune de Dampicourt représentée par Jules Claude Bourgmestre, Jean Hermant échevin, et François Cornet échevin.

Leurs intérêts sont défendu maître Camille Castilhon (avocat). Cependant, le premier groupe a pour avoué Monsieur Mortehan et le second Monsieur Netzer.

Les parcelles concernées par l’emprise du chemin de fer sont :

Fond de carte : OpenStreetMap contributors under ODbL – Umap (https://umap.openstreetmap.fr).

Depuis le 1er août 1878, la Compagnie du chemin de fer a pris possession des emprises.

« Toutes les formalités prescrites par la loi pour parvenir à l’expropriation pour cause d’utilité publique [ayant] été remplies dans l’espèce », la Cour avait ordonné une expertise en vue de fixer les indemnités. Le rapport avait été rendu le 25 avril 1881. La procédure judiciaire durait depuis au moins deux années.

La cour alloue 2.701,78 francs d’indemnités pour la parcelle no 8 du chef de la valeur vénale des emprises ; de la valeur de 24 saules têtards, d’un peuplier et d’un noyé desséché ; pour la construction d’un aqueduc et pour la dépréciation de l’excédent gauche et droit de la parcelle.

L’indemnité est repartie entre Jean-Baptiste Noël (29/54e), Virginie Noël (1/54e) et les défendeurs Saint-Mard (24/54e restant).

La cour alloue 466,2 francs d’indemnités pour la parcelle no 9 du chef de la valeur vénale des emprises ; du chef de la dépréciation du terrain nécessaire pour l’élargissement du fossé de décharge ; du chef de la valeur d’une haie vive arrachée sur 50 mètres. L’indemnité sera versée à la Caisse des Dépôts et consignations en attendant un jugement statuant sur les droits respectifs des défendeurs.

La cour alloue 618,6 francs d’indemnités pour la parcelle no 10 du chef de la valeur vénale des emprises ; du chef de dépréciation du terrain nécessaire pour l’élargissement du fossé de décharge ; du chef de la valeur de dix saules têtards et pour construction d’un ponceau sur voûte en maçonnerie. L’indemnité revient à Jean-Baptiste Noël, dit Babisse, car il est le seul en droit de la réclamer.

La compagnie du chemin de fer de Virton devra payer des frais de remploi calculés à raison de 10 % sur le montant des indemnités et les intérêts légaux seront calculés à partir du 1er août 1878. Elle est de plus condamnée à payer tous les dépens, « à l’exception du tiers de la masse des frais postérieurement à l’expertise jusque et non compris le présent jugement ».

Litige immobilier (parcelle no 9)

Une cause secondaire vient se greffer aux difficultés d’expropriation. Jean-Baptiste Noël dit Babisse se considère comme unique propriétaire de la parcelle no 9, mais la commune de Dampicourt revendique trois huitièmes de la parcelle, Jean-Baptiste Saint-Mard un huitième et François Simon époux de Nicolas Genin un huitième.

« Les conclusions signifiées au nom du sieur Jean-Baptiste Noël, dit Babisse, seul en qualités qu’il agit l’admettre subsidiairement à prouver pour toutes voies de droit et même patrimoine que l’acte de partage avenu devant maître Lambinet, notaire à Virton, en date du 19 août 1858, a été suivi d’une délimitation effectuée sur le terrain ; et pour le cas où la commune défenderesse persisterait à soutenir que l’emprise se fait, soit en tout, soit en partie dans la portion de prairie qui lui a été attribuée par l’acte de partage pré rappelé, nommer des experts qui auront pour mission de visiter les lieux, et de déterminer dans quelle partie de la prairie numéro 1357b et 1359 du cadastre, se fait l’emprise nécessaire à l’assiette de la voie ferrée. »

La cour constate « que les documents produits ne permettent pas au Tribunal de trancher les difficultés qui les divisent, qu’i y a donc lieu d’ordonner le dépôt à la Caisse des Dépôts et consignation, des indemnités qui vont être ci-dessous allouées du chef de ladite emprise ; de disjoindre les difficultés de l’action en expropriation, et de continuer à cette fin, l’affaire à une audience ultérieure, pour permettre aux parties de s’expliquer plus amplement. »

Par un jugement du tribunal de première instance d’Arlon rendu le 24 mars 1887, Catherine Lambinet veuve Josset, négociante domiciliée à Virton provoque la vente par licitation de la parcelle no 1359 section C du cadastre de Dampicourt qui avait fait l’objet d’une contestation de propriété entre Jean-Baptiste Noël dit Babisse, Jean-Baptiste Saint-Mard, Françoise Simon épouse de Nicolas Genin et la commune de Dampicourt.

Entre le jugement du 11 mai 1883 et celui du 24 mars 1887, nous constatons plusieurs différences. En 1833, la parcelle de 52 ares 60 centiares amputée d’une emprise de 6 ares 44 centiares a une superficie réduite à 46 ares 16 centiares. En 1887, le terrain a une étendue de 43 ares 70 centiares soit une diminution de 2 ares 46 centiares qui est peut-être la part de la commune de Dampicourt qui n’est plus mentionnée comme copropriétaire.

La deuxième différence concerne les propriétaires. Dans le premier jugement, la commune de Dampicourt revendique trois huitièmes de la parcelle, dans le second, elle n’apparaît plus. Jean-Baptiste Noël voit sa part de copropriété passée de trois huitièmes à six huitièmes. Le huitième restant n’est plus la propriété de Françoise Simon, mais de Joseph Dupont. La part de Jean-Baptiste Saint-Mard n’a pas changé.

Les éléments présents dans le jugement du 24 mars 1887 laissent à penser que Jean-Baptiste Noël fut débouté, il n’a pas été reconnu comme unique propriétaire. Jean-Baptiste Saint-Mard a été maintenu dans ses droits, tout comme Françoise Simon qui a probablement vendu sa part.

Dans ses motivations, la cour mentionne « qu’il y a chose jugée sur la question de la copropriétaire de la prairie litigieuse. » « Le tribunal sans s’arrêter à l’offre de preuve du défendeur Noël, laquelle est rejetée comme irrélevante et inutile, déclare le dit défendeur mal fondé en sa fin de non-recevoir et statuant au fond, le condamne à procéder avec ses codéfendeurs à la poursuite et diligence de la demanderesse, à la vente par licitation de l’immeuble ci-dessus désigné, pour le prix à en provenir, être partagé entre les parties selon les droits. »

Vente publique du 31 août 1885 : Listes des biens et acquéreurs

Nous connaissons le nom des acheteurs, la nature des biens, les surfaces et les prix convenus à la faveur d’une copie du procès-verbal de la vente publique du 31 août 1885 annexée à une ordonnance du juge Waxweiler du tribunal de première instance d’Arlon rendue le 25 janvier 1888.

Acheteur Nature surface Prix
Nicolas Duspaux terre 40 a. 40 c. 240
Jean-Baptiste Saint-Mard terre 24 a. 10 c. 170
Auguste Saint-Mard terre 27 a. 20 c. 400
Auguste Saint-Mard terre 23 a. 30 c. 150
Auguste Saint-Mard pré 88 a. 50 c. 3.130
François Charles-Genin terre 31 a. 50 c. 100
François Charles-Genin terre 15 a. 45 c. 380
Nicolas Cornet terre 56 a. 60 c. 1.555
Nicolas Cornet terre 43 a. 90 c. 1.100
Pierre Joseph Berque terre 50 a. 90 c. 76
Joseph Claisse-Authelet terre 10 a. 90
Nicolas Corard jardin 4 a. 90 c. 370
Nicolas Bastin pré 21 a. 20 c. 720
Octave Noël pré 52 a. 40 c. 810
Nicolas Stasser pré 7 a. 60 c. 120
Clémence Agathe Saint-Mard pré 73 a. 3.430
Joseph Jacob-Escarmelle maison 1 a. 40 c. 5.150
  Total général Total 5 ha. 72 a. 35 c. 17.991 francs


Notes

[1] La dette est de 662 francs 32 centimes, mais la vente ne rapporte que 607 francs et 50 centimes. Il manque 54 francs 82 centimes.

[2] JOANNES, Bernard. Et si Lamorteau m’était conté... Dampicourt, Les Éditions de la Joyeuserie, 2001, pp.139-140.

[3] Ibidem.