Carnets de notes - Une famille Saint-Mard

Le patrimoine de la communauté Jean-Baptiste Saint-Mard et Anne Marie Simon à Dampicourt

Identification

Jean Baptiste Saint Mard, fils de Jean St Mard (1732-1775) et Marie Magdelaine Joannes (1734-1788), est né en 1767 à Thonne-les-Près, village meusien bâti au pied de la place forte de Montmédy (Meuse, France). Son père, qui a droit de bourgeoisie, est laboureur (cultivateur propriétaire de ses terres) et accessoirement brasseur.

Jean Baptiste — ancien séminariste — épouse en 1796 Anne Marie Simon (1767-1847) fille d’un laboureur de Dampicourt (Luxembourg, Belgique, anciennement département des Forêts et duché de Luxembourg), village dans lequel il s’est réfugié. De cette union naissent quatre enfants :

Jean Baptiste Saint Mard est décédé le vendredi 19 juillet 1816, à l’âge de 48 ans, à Velosnes (Meuse, France).

Préambule

Ni dans les archives familiales ni dans le contrôle des actes du bureau de Montmédy (AD55 : 1708 — An IX), nous ne trouvons d’acte se rapportant à la succession des parents de Jean-Baptiste Saint-Mard. Ces derniers étant des laboureurs, lors de leur décès, leur patrimoine a dû être divisé en trois lots (Jean-Baptiste, Jean-Joseph et Anne Marie). Fréquentant le collège des récollets, il est peu probable qu’il se destinait au métier de cultivateur. Il n’a pas dû conserver son héritage.

Dans le cadre de l’évolution du patrimoine de la communauté formé par Jean-Baptiste Saint-Mard et Anne Marie Simon, nous pouvons parler de quatre périodes.

Il n’est pas possible de déterminer à quelle période Jean-Baptiste Saint Mard arrive à Dampicourt, village frontalier du duché de Luxembourg dans lequel vit la veuve du dernier Saint Mard de la branche aînée. En septembre 1792, il séjourne à Trèves [1]. Séminariste, il aurait dû devenir prêtre. En décembre 1794 [2], il réside à Dampicourt et s’y marie en août 1796 [3]. Nous avons un vide de deux ans.

Avant 1800, le ménage ne possède qu’une petite terre de 8 ares 43 située sur le ban de Mathon, lieu-dit entre deux villes avec un petit bâtiment y construit [4]. L’affectation de la construction n’est pas précisée. Maison ou bâtiment agricole. Le lieu-dit permet de circonscrire un endroit bien précis du village quelque part le long de l’actuelle rue de Mathon entre l’église et le quartier de Mathon, ancienne communauté distincte de Dampicourt. Proche de l’endroit où le couple construira sa maison ferme.

Nous avons un indice en notre possession pour connaître le statut social du couple à cette date. En 1804, le bail à ferme liant Jean-Baptiste St Mard à Paul Joseph de Nonancourt, demeurant à Yzel, est à son terme [5]. Nous ne connaissons pas quand il a été conclu. Le 5 mai 1811 [6], Jean-Baptiste St Mard est témoin dans un bail de mise en location pour 3-6-9 années consécutives d’un bien rural appartenant à Jacques Herbain et provenant de la vente faite par Jean Étienne Ferdinand Deprez, propriétaire à Dampicourt. Par analogie, si nous considérons que le bail a été conclu aux mêmes conditions, la signature doit avoir eu lieu au plus tôt en 1795.

L’exploitation Nonancourt constituée de deux corps de ferme réunis en un seul, sis à Dampicourt et bans voisins consistants en terre, prés et chènevières a une superficie de 26 hectares. Le 16 floréal An XII (6 mai 1804), les héritiers Nonancourt liquident la succession par vente par hausse publique. Jean-Baptiste achète sept parcelles de terres labourables et deux prairies d’une superficie totale de 3 hectares 64 ares soit environ 15 % des superficies vendues. Le ménage Saint Mard-Simon est le second plus gros acheteur. Le plus important, c’est Joseph de Neunheuser, ancien seigneur qui achète pour un total de 10 hectares 79 ares 85 centiares.

Cette vente et le fermage du domaine Nonancourt posent la question de l’argent. Quelle garantie a pu donner Jean-Baptiste pour conclure son bail à ferme ? Comment arrive-t-il à financer l’achat 6 mai 1804 ? En arrivant à Dampicourt, Jean-Baptiste avait-il une cassette issue de la succession de ses parents ?

De 1804 à 1816, le ménage est cultivateur propriétaire de ses terres. L’agrandissement du domaine se fait par à-coup. Jean-Baptiste est un notable. Il est conseiller communal puis adjoint-maire.

La chute de l’empire napoléonien en 1815 entraîne le départ du couple vers Velosnes (Meuse, France) où Jean-Baptiste décède prématurément en 1816. Dans un premier temps, Jean-Baptiste a mis la moitié de ses terres en bail à ferme. Mais le déménagement semble ne pas s’être fait dans de bonne condition. Ils ont quitté leur ferme avant la moisson et sont endettés.

À Velosnes, Anne Marie Simon veuve Saint Mard est fermier de Monsieur de Marche. Deux de ses quatre fils s’y marient. Au mois de juillet 1830, son second fils Jean-Baptiste Saint-Mard (1800-1890) réside à Dampicourt. Il y donc est rentré au moins deux mois avant la révolution belge de septembre 1830. En toute logique, Anne Marie Simon rentre à Dampicourt avec son fils benjamin avant février 1831, mois durant lequel la première constitution belge est promulguée [7]. Elle y terminera sa vie, son fils Louis s’y mariera, deviendra échevin, son autre fils Jean-Baptiste reste célibataire.

Gestion du patrimoine d’autrui : Fermier

Le ménage Saint Mard-Simon avant 1800 n’est propriétaire que de trois quart de terre située sur le ban de Mathon, lieu-dit entre deux villes avec un petit bâtiment y construit qui leur sert très certainement de maison. L’état contenant des renseignements sur le Maire, l’Adjoint et les Membres du Conseil municipal (An XI) daté du 23 février 1803 qualifie Jean-Baptiste Saint Mard, 35 ans, Conseiller municipal sortant, de « fermier, peu monnayé ».

Dans l’acte d’une vente publique et en détail de deux corps de ferme à Dampicourt réalisé le 6 mai 1804 par le notaire Michel Michel, Jean-Baptiste saint Mard est désigné comme fermier en fin de bail des héritiers indivis Nonancourt. Le bail a probablement été conclu en 1795.

La propriété Nonancourt est conséquente. Elle se compose de 73 parcelles de terre labourable et de 15 prairies pour une superficie totale d’un peu plus de 25 hectares.

Nature Superficie Pourcentage
Prairies 2 h. 85 a. 61 c. 11,26 %
Terres labourables 22 h. 50 a. 58 c. 88,74 %
Total général 25 h. 36 a. 19 c. 100,00 %

Habitation et bâtiments

La ferme de 1813

Le diable se cache dans les détails. La ferme familiale sise rue de Mathon à Dampicourt n’est pas l’habitation primitive du ménage Saint-Mard Simon. Sur les rares photographies de celle-ci que m’a donnée Marie-Louise Laukes veuve de Jean Piton, le linteau de la porte du logis est millésimé 1813.

La ferme existe encore de nos jours, mais entièrement dénaturée. Enfant, je suis rentré dedans lorsque nous rendions visite à l’oncle Gaston.

En février 1797, le premier achat du couple est un petit terrain sis ban de Mathon à lieu-dit Entre Deux Villes sur lequel est construit un petit bâtiment. Ils ont pour voisin à l’est le citoyen Deprez (Deprez de Barchon ancien seigneur de Dampicourt et Mathon), à l’ouest Henri La Roche et abouti au grand chemin de Meix.

La description est maigre. La localisation approximative, mais somme toute compatible avec la situation de 1813. Tous les scénarios sont possibles. Avant 1804, le ménage occupait une demeure comprise dans le bail à ferme, en louait une autre ou avait aménagé ledit petit bâtiment en logis. Aucun acte ne nous permet de répondre à cette question.

Durant toute la première moitié du 19e siècle, la séparation en deux villages de Dampicourt reste très marquée. À l’ouest de l’église, dans la partie la plus basse, Dampicourt proprement dit. À l’est de l’église, l’ancienne communauté de Mathon. Entre « les deux villes », un espace vide. À équidistance entre les deux quartiers, entre la rue d’Aigremont — actuelle rue de Mathon — et la rivière le Ton, la seigneurie d’Aigremont-la-Neuve. Sur l’autre côté de la rue, environ quarante mètres plus à l’est, le premier îlot du quartier de Mathon comprenant en 1840-1843 (cadastre primitif belge) quatre immeubles. De l’ouest (côté église) à l’est, habite dans la première maison Henri Carré, colporteur ; la deuxième, Jean-Baptiste Laroche, journalier ; dans la troisième Nicolas Dropsy et la dernière formant pignon côté sud est celle de Jean-Baptiste St Mard et Anne Marie Simon.

En rouge vif, maison de Jean-Baptiste Saint-Mard.

Le jardin de la ferme familiale est plus large que la maison, il commence à la rue d’Aigremont et se termine à la Grand’ Route, route de Virton à Montmédy. L’espace libre côté est permettra la construction d’une seconde écurie et grande grange. Sa superficie est de 30 ares 20 centiares [8] (bulletin des propriétés de 1822) ou 29 ares 30 centiares (bulletin des propriétés de 1844).

Relevons le nom du propriétaire du second bâtiment de l’ensemble : Jean-Baptiste Laroche, journalier. En 1797, le petit bâtiment du ménage a pour voisin Henri La Roche au couchant. La troisième bâtisse « Dropsy » serait-elle ledit bâtiment ? Cela mériterait vérification.

Deux actes notariés décrivent la ferme de 1813. Le premier — du vivant d’Anne Marie Simon veuve St Mard — est la donation de la nue-propriété de sa maison faite à ses enfants le 6 septembre 1846 [9]. Le second est la vente le 5 janvier 1878 [10] de la nue-propriété de la maison par Jean-Baptiste St Mard à ses neveu et nièce Jean-Baptiste Saint-Mard et Marie-Joseph Saint-Mard, époux cousins germains.

État de la ferme au début des années 1950 avant la destruction de la grande grange.
Photographie de gauche : Georges Saint-Mard (1909-1986) — mon parrain et son épouse Nelly Didier (1914-2004).

Un jeu de trois petites photographies ci-dessus ainsi que quelques photographies de famille prises devant le logis nous permettent de connaître son aspect général. Un plan schématique du premier niveau et de l’organisation des étages, dessiné par Papa à ma demande, me permet d’en connaître l’organisation au début des années 1950 avant la destruction de la grande grange. Nous connaissons la forme de l’emprise de la ferme de 1813 par le plan cadastral de 1840-1843.

Il s’agit d’une ferme tricellulaire lorraine des plus classiques, académique. Celle que l’on décrit dans tous les ouvrages. La ferme d’un moyen cultivateur propriétaire de ses terres.

Elle est implantée presque à front de rue avec un usoir très étroit d’une profondeur de trois à cinq mètres. Son alignement n’est pas parallèle à la rue. L’emprise varie de 200 m² (bulletin des propriétés de 1822) à 290 m² (bulletin des propriétés de 1844).

De gauche à droite sur la photographie (de l’ouest à l’est), les deux premières travées agricoles et la troisième — le logis — constituent la ferme d’origine.

La première cellule est occupée par une grange dont la porte charretière est surmontée d’une poutre linteau. Le mur gouttereau, dans l’axe du piédroit intérieur, est muni d’une ouverture plus large que haute sous la corniche pour aérer les combles.

La seconde cellule est l’écurie pour les chevaux de l’exploitation et le bétail. La fonction est matérialisée par la porte à deux battants — celui du haut pouvant rester ouvert pour l’aération et une petite fenêtre. Le tout surmonté d’un haut mur plein sans porte-gerbière ni autre ouverture.

Une descente d’eau de pluie marque la séparation avec le corps de logis. L’acte de vente du 5 janvier 1878 [11] décrit le corps de logis comme suit deux pièces basses et deux pièces hautes, ainsi qu’une cave.

La cave voûtée est aérée par un soupirail situé sous la fenêtre du rez-de-chaussée. Sa profondeur est identique à celle de la cuisine sise au-dessus d’elle.

La façade du logis comprend trois ouvertures. Au rez-de-chaussée, la porte d’entrée et sa marche, une fenêtre à double battant et sous celle-ci le soupirail de la cave. Dans l’alignement de la fenêtre, au premier étage une seconde fenêtre. À l’origine, le corps de logis ne devait pas être légèrement surélevé comme dans son état final. En effet, sur les photographies de 1950, nous constations une reprise de l’enduit de façade.

Au premier niveau, à front de rue, nous trouvons la cuisine, pièce centrale de la maison, carrefour des flux de circulations. Elle est isolée de la porte d’entrée par un sas fermé départ d’un escalier droit descendant dans la cave. Dans son état initial, deux portes donnent accès au pèle — belle pièce du rez-de-chaussée donnant sur le jardin, et aux anciennes écuries. Un escalier fermé droit permet de monter à l’étage. De plan classique, la cuisine est équipée d’une cheminée accolée au mur central percé d’une ouverture comblée par une taque de fer diffusant la chaleur dans l’armoire du pèle encastrée dans ledit mur. Contre le mur gouttereau de la façade, un évier et sa pompe sous la fenêtre dont les eaux usées sont évacuées par un tuyau de plomb traversant ledit mur et recueillie dans un seau.

À l’arrière, la belle pièce dite pèle.

Au premier étage, deux chambres de dimension identique aux pièces du rez-de-chaussée. En toiture, les combles non aménagés.

Au pignon est, nous avons en quelque sorte une quatrième demi-cellule. S’agit-il d’appentis ou d’une construction plus importante ? Nous n’avons aucun indice pour répondre à cette question. Cet ensemble a-t-il été détruit lors de la construction de la seconde écurie et grange ou incorporé à celle-ci, nous ne le saurons jamais ? De nos jours, il ne reste que les trois premières cellules remaniées.

Cession de la ferme

Revenue dans son village natal après un exil de quatorze années à Velosnes, Anne Marie Simon avec l’aide de ses fils Jean-Baptiste et Louis avait repris l’exploitation du domaine familiale dès les années 1830. Par un jeu de donation, d’échange et de rachat de part impliquant ses quatre fils, elle transmet l’intégralité de la nue-propriété de la maison, grange et écurie à son second fils Jean-Baptiste Saint-Mard. Par devant maître Lambinet, notaire à Virton, les actes sont signés le 6 septembre 1846 [12]. Elle conserve l’usufruit le reste de « sa vie durant ». À cette époque, les voisins sont Nicolas Dropsy, fondeur en fer et madame Puttkammer.

En août 1847, Anne Marie Simon meurt. Lorsque Jean-Baptiste St Mard, deuxième fils célibataire vend le 5 janvier 1878 [13] à son neveu, Jean-Baptiste Saint-Mard époux de Marie-Joseph Saint-Mard, la nue-propriété de la maison, il a pour voisin Bouvier, la veuve Herbain-Dropsy et Auguste Saint-Mard. Le corps de logis comprend deux pièces basses et deux pièces hautes, ainsi qu’une cave. Le jardin a une surface d’environ 15 ares soit la moitié de la surface initiale. En effet, le 6 septembre 1846, la moitié du jardin jouxtant la Grand’Route avait été exclue du partage et était restée propriété de Joseph et Louis Saint-Mard, fils d’Anne-Marie Simon.

Location d’une maison à Velosnes (1816-1830)

Devenue fermier du baron de Marche à Velosnes, la famille Saint-Mard loge dans une maison appartenant à Madame de Marche. L’inventaire après décès du 11 novembre 1816 [14] nous la décrit comme une demeure sans étage à quatre pièces d’habitation au rez-de-chaussée, une cave, un grenier, une écurie et une grange. Ayant plus d’une fois traversé le village tant à pied, vélo qu’en voiture, je n’ai jamais aperçu le moindre bâtiment pouvant correspondre à cette description. Le patrimoine n’étant pas immuable, des immeubles ont été détruits d’autres transformés.

La pièce maîtresse de la demeure est la cuisine dans laquelle nous trouvons un coin cuisson comprenant une poêle à feu, un soufflet à canon, une pincette et une paire de croupes à cendre. Anne-Marie a à sa disposition un gros pot en fer, quatre pots ordinaires, deux marmites en fer blanc, quatre gamelles en terre, une douzaine d’assiettes en faïence, un saladier et des pots et cuvettes à lait.

Le pèle à côté de la cuisine est la seconde pièce la plus importante de la maison. C’est à la fois une pièce de vie et de nuit garnie d’une table sans chaise, d’une armoire, de trois lits de plumes et de quatre bois de lit. Nous y trouvons en sus deux paillasses, un matelas, trois oreillers, quatre couvertures en laine.

Les deux chambres, l’une donnant et prenant entrée dans la cuisine, l’autre vis-à-vis de la cuisine, ressemblent à des débarras. Dans la première, nous y trouvons une maie à pétrir — armoire pour stocker la farine et pouvant servir de pétrin, une tinette — petit baquet de bois servant au transport du beurre salé ou fondu ou petit récipient en tôle servant au transport des matières fécales, servant de fosse d’aisances. L’inventaire ne précise pas à quel usage elle est destinée.

Dans la seconde chambre, nous y trouvons un tonneau à lessive, vingt-quatre kilogrammes de chaume, quatre kilogrammes et demi de fil, deux poêles à frire, un chandelier et une lanterne.

Cent quarante doubles décalitres de pomme de terre sont stockés dans la cave ainsi que six corbeilles et trois futailles — récipient sphérique en bois pouvant contenir un liquide (vin, eau de vie, cidre…).

Dans le grenier, quatre essuies de voitures et un poêle avec les bûches.

À première vue, les conditions de vie de la veuve Saint-Mard et ses enfants sont très spartiates à Velosnes. L’équipement du ménage tant pour sa vie domestique que pour exercer son activité agricole n’est pas complet.

De cette constatation, nous pouvons tirer une conclusion réaliste. Le 19 juillet 1816, jour de décès de Jean-Baptiste Saint Mard, le déménagement des biens mobiliers du ménage n’était pas terminé.

Évolution dans le temps du patrimoine

Marge d’incertitude

Situation Superficie (A) Année de référence « évolution » Superficie « évolution » (B) Différence A-B
Bulletin 1822 13 h. 63 a. 65 c. 1825 15 h. 58 a. 81,6083 c. 1 h. 95 a. 16,61 c.
Bulletin 1844 12 h. 59 a. 90 c. 1845 16 h. 30 a. 96,1083 c. 3 h. 71 a. 6,11 c.
Déclaration de succession 14 h. 99 a. 80,5 c. 1845 16 h. 30 a. 96,1083 c. 1 h. 31 a. 15,61 c.
Partage des biens après décès 16 h. 50 a. 62,25 c. 1845 16 h. 30 a. 96,1083 c. -19 a. 66,14 c.

D’un côté, la compilation des actes de mutation immobilière me permet de reconstituer le patrimoine du couple Saint-Mard-Simon, d’un autre côté des documents de synthèse me permettent d’évaluer la pertinence de la reconstruction. Les bulletins de propriétés du cadastre de 1822 [15], le partage des biens en 1847 et l’enregistrement de la succession la même année offrent trois photographies précises des biens immobiliers du couple.

Si nous comparons la superficie calculée du domaine en 1825 avec la somme des bulletins des propriétaires d’Anne Marie Simon veuve Saint Mard en 1822 pour ces possessions à Dampicourt, Montquintin et Villers-la-Loue, nous avons l’impression qu’elle est surévaluée d’environ deux hectares.

Le bulletin des propriétés de 1844, s’il nous permet une analyse qualitative du domaine agricole, ne nous permet pas de comparaison, car je n’ai à ma disposition que celui de Dampicourt qui à cette époque englobe Montquintin, mais pas celui de Villers-la-Loue.

La déclaration de succession (janvier 1848) est la plus perturbante, car elle reprend une surface totale largement inférieure au partage des biens en décembre 1847. La différence de 1 hectare 31 ares pourrait sous toute réserve être interprétés comme des biens propres à Jean-Baptiste Saint Mard (1767-1816) qui ne doivent plus être déclarés. Cette explication ne me satisfait qu’à moitié et j’ai déjà rencontré pour d’autres couples des différences similaires sans que je puisse les expliquer.

In fine, il existe une différence mineure de 19 ares 66 centiares entre la superficie totale des biens issus de Jean Baptiste Saint Mard et Anne Marie Simon partagés entre leurs fils le 17 décembre 1847 et la surface totale calculée par mes soins.

Le total des biens partagé est légèrement supérieur à celui de la taille estimée de l’exploitation en 1845. La reconstitution peut être considérée comme fiable, comme reflétant la situation réelle.

Le domaine agricole

Années Terre Prairie Total
1800 8 a. 43,18 c. 0 8 a. 43,18 c.
1805 5 h. 45 a. 24,7 c. 76 a. 10 c. 6 h. 21 a. 34,7 c.
1810 14 h. 29 a. 52,7 c. 2 h. 10 a. 44 c. 16 h. 39 a. 96,7 c.
1815 14 h. 38 a. 95,7 c. 2 h. 13 a. 20 c. 16 h. 52 a. 15,7 c.
1820 14 h. 38 a. 95,7 c. 1 h. 27 a. 44,5 c. 15 h. 66 a. 40,2 c.
1825 14 h. 38 a. 95,7 c. 1 h. 19 a. 85,9 c. 15 h. 58 a. 81,6 c.
1830 17 h. 55 a. 13,7 c. 1 h. 62 a. 73,4 c. 19 h. 17 a. 87,1 c.
1835 14 h. 76 a. 65,7 c. 1 h. 29 a. 0,4 c. 16 h. 5 a. 66,1 c.
1840 14 h. 89 a. 30,7 c. 12 h. 90 a. 0,4 c. 16 h. 18 a. 31,1 c.
1845 15 h. 1 a. 95,7 c. 12 h. 90 a. 0,4 c. 16 h. 30 a. 96,1 c.

Pour des raisons qui ne peuvent être appréhendées par les archives consultées, les premières vingt années de son installation à Dampicourt, Jean-Baptiste n’achète aucun bien excepté huit mois après son mariage avec Anne Marie Simon fille de laboureur un petit terrain situé sur le ban de Mathon, lieu-dit entre deux villes avec un petit bâtiment y construit.

En 1801, Anne Marie reçoit de sa mère Hélène Collignon veuve de Pierre Simon 2 hectares 39 ares de terres et prairies. En 1804, les héritiers Nonancourt mettent en vente publique le domaine que Jean-Baptiste exploitait en qualité de fermier. Le ménage achète sept parcelles de terres labourables et deux prairies. À partir de cette vente, par à-coup, il agrandit le domaine. En 1825, l’exploitation du couple a une superficie légèrement supérieure à 6 hectares. Le ménage est parent de trois enfants. Un quatrième est en gestation. Jean-Baptiste et Anne Marie sont âgés de 37 ans.

Le second à-coup se produit en 1808 et 1809 après une période de presque quatre années sans acquisition. En janvier 1808, lors d’une vente publique, le ménage acquiert un peu moins un demi-hectare de terres. Les 31 mai 1808 [16] et 3 mai 1809 [17], il achète 9 hectares aux héritiers Guillaume de Velosnes, Tintigny et Jamoigne. Le domaine en 1810 a une taille respectable de 16 hectares 39 ares. En cinq années, le ménage est passé du statut social de fermier à gros agriculteur. De « peu monnayé », ils sont devenus « aisés ».

Jusqu’au départ du couple à Velosnes et au décès de Jean-Baptiste en 1816, le couple n’achète plus aucun bien. La superficie totale des biens évolue marginalement par suite d’un échange en juin 1811. En 1815, la surface totale des biens non compris la maison ferme et son jardin, est de 16 hectares et demi.

La fin du Premier Empire français, la rétrocession de duché de Luxembourg au roi des Pays-Bas qui l’intègre à son royaume en août 1815, le déménagement à Velosnes et la mort de Jean-Baptiste Saint Mard gèle l’évolution du domaine à Dampicourt qui est conservé par sa veuve. Les terres sont mises en fermage.

Durant son exil à Velosnes, Anne Marie Simon est la fermière du baron de Marche. Les premières années de veuvage, son beau-frère, chef d’escadron démobilisé est son fondé de pouvoir. Elle lui vend à réméré quelques biens pour apurer les dettes du ménage. Au plus tard en 1821, après le décès de son beau-frère Jean Joseph Saint Mard, elle reprend en mains les affaires de Dampicourt. Son second fils Jean-Baptiste (1800-1890) est de retour à Dampicourt au minimum deux mois avant la révolution belge de 1830.

À partir de 1828, Anne Marie achète quelques biens dont la part échue à Anne Marie Saint-Mard, veuve de François Montlibert des prairies vendues à réméré à son beau-frère. En juillet 1829, elle agrandit son exploitation de 2 hectares 86 ares (vente publique). En 1830, l’exploitation atteint sa taille maximale de 19 hectares 17 ares.

En 1835, conséquence d’une donation à ses fils qui l’on suivit à Dampicourt, la taille du domaine diminue de 3 hectares 24 ares. Un dernier achat de 12 ares en 1836. Ensuite, il n’y a plus d’évolution.

L’exploitation est liquidée après la mort d’Anne Marie Simon.

Description du patrimoine

Bulletin des propriétés — 1822

Les bulletins de propriétés de 1822 et 1844 sont les uniques fonds de l’administration du cadastre déposé aux archives de l’état à Arlon. Documents de travail produit lors d’un recensement fiscal servant à établir une nouvelle matrice cadastrale, ils peuvent présenter des erreurs de propriétaires qui sont corrigées sur ledit bulletin. En revanche les « erreurs » de contenance ou de classification font l’objet d’une procédure en réclamation et l’éventuelle rectification n’est pas portée sur le bulletin.

Nature Superficie Pourcentage
Labour 11 h. 30 a. 45 c. 82,90 %
Pré 2 h. 1 a. 14,74 %
Jardin 30 a. 20 c. 2,21 %
Maison 2 a. 0,15 %
Total général 13 h. 63 a. 65 c. 100,00 %

Le bulletin de 1822 décrit une exploitation agricole où la culture des terres labourables est l’activité principale et l’élevage une pratique secondaire. Les praires servent à la production de foins et herbes pour nourrir les chevaux de ferme et le bétail à la mauvaise saison. À la bonne saison, les animaux pèsent dans les pâtures qui éventuellement peuvent être des prairies qui ne produiront pas du regain.

La propriété comprend :

En 1822, à Dampicourt le rapport entre les terres labourables et les prairies est de 74,18 %/25,82 %. Celui de l’exploitation Saint Mard-Simon est de 84,90 % de terres et 15,10 % de prairies.

La propriété s’étend sur trois sections cadastrales : 83,62 % à Dampicourt, 14,56 % à Montquintin et 1,82 % à Villers-la-Loue.

Localisation et nature Superficie
Dampicourt 11 h. 40 a. 35 c. répartis comme suit :
Jardin 30 a. 20 c.
Labour 9 h. 7 a. 15 c.
Maison 2 a.
Pré 2 h. 1 a.
Montquintin 1 h. 98 a. 50 c. répartis comme suit :
Labour 1 h. 98 a. 50 c.
Villers-la-Loue 24 a. 80 c. répartis comme suit :
Labour 24 a. 80 c.
Total général 13 h. 63 a. 65 c.

Classement des propriétés

Classement Superficie Pourcentage
1 75 a. 60 c. 5,54 %
2 3 h. 76 a. 10 c. 27,58 %
3 7 h. 62 a. 85 c. 55,94 %
4 1 h. 47 a. 10 c. 10,79 %
5 2 a. 0,15 %
Total général 13 h. 63 a. 65 c. 100,00 %

La distribution qualitative des superficies dessine presque une courbe de Gauss. De manière étonnante, la maison probablement inhabitée est classée en cinquième catégorie.


Classe
Dampicourt (1822) 1 2 3 4 5 Non classé Total général
Terre 18,60 % 33,31 % 38,55 % 9,54 %

100,00 %
Prairie 37,55 % 34,90 % 27,55 %


100,00 %

La distribution qualitative des biens du couple ne reflète pas la qualité des terres et prairies de Dampicourt en 1822. Il y a une surreprésentation des biens de troisième catégorie au détriment de biens de première et seconde catégorie.

La synthèse de l’expertise des communes de Dampicourt et Montquintin en 1819-1823 décrit précisément le territoire, la classification fiscale des biens, les productions agricoles. C’est une précieuse source pour affiner la description du domaine des ancêtres.

En fonction de la qualité de leur sol et de leur productivité, les terres labourables se divisent en quatre classes.

2,85 % des terres du ménage Saint Mard-Simon sont de première catégorie. Sur la section de Dampicourt, leur sol est une terre noirâtre faiblement mêlée d’argile d’une culture facile. Elles se situent dans de petits fonds, sur des pentes douces, à portée des habitations. À Montquintin, il s’agit d’une terre végétale rouge mêlée de pierres en grande quantité qui repose sur un fond argileux.

23,33 % des terres sont de seconde classe. À Dampicourt, elles sont plus sablonneuses que les terres de premier choix. Elles sont situées dans côtes plus rapides et leur sol est moins profond. À Montquintin, leur sol est moins profond que celle de première catégorie. Elles sont situées dans des revers plus inclinés, ou à des expositions moins favorables.

60,81 % des terres labourables du ménage sont de troisième classe. À Dampicourt, elles se divisent en deux catégories. Des terres légères fortement sablonneuses et des terres sur sol compact difficile à la culture. Ces terres dont la plupart se situent sur les hauteurs de Montquintin ont une plus faible profondeur que les terres des deux premières catégories. Sur la section de Montquintin, cette classe regroupe quatre natures de terres de couleur différente : brune, bleue, rouge et blanche. Les terres brunes mêlées de pierres sont extraordinairement compactes et nécessitent six bons chevaux pour être labourées. Les terres bleues ont la même dureté que les terres brunes. Les terres rouges sont très chargées en pierre. Les terres blanches se liquéfient au printemps, les semences y périssent. Ces terres de faible profondeur occupent les revers et plats inclinés des coteaux.

Pour terminer, 13,01 % des terres sont de quatrième et dernière classe. À Dampicourt, elles se situent essentiellement aux extrémités du territoire communal. Ce sont des terres pierreuses de faible consistance et faible profondeur. Quelques-unes sont fortes et de couleur blanche. À Montquintin, ce sont soit des terres rouges plus pierreuses que terreuses reposant sur une rocaille profonde et proche de bois, soit une terre bleue des très mauvaises qualités, très difficilement labourable et d’un rendement insignifiant. 18 ares 60 centiares des terres de classe 4 sur un total de 1 hectare 28 ares 50 centiares sont situées sur la commune de Montquintin, le reste sur celle de Dampicourt.

À Dampicourt, les terres des deux premières classes sont propres à la culture du froment, du méteil, de l’avoine, de l’orge, du trèfle et des pommes de terre. Celle de troisième à la culture du froment, du seigle, de l’avoine et du trèfle. Celle de quatrième catégorie au seigle, au froment et à l’avoine.

À Montquintin, les terres des deux premières catégories sont propres à la culture du froment, de l’orge, de l’avoine, et du trèfle. Les terres de troisième classe sont soit propres à la culture du froment soit à celle du méteil. Toutes les terres de troisième catégorie sont propres à la culture de l’avoine. Les terres de quatrième classe sont principalement propres à la culture du méteil, du seigle et de l’avoine, mais peuvent être plantées en froment.

Comme les terres labourables, les prairies se divisent en trois classes. Cinquante-cinq pour cent de leurs prés sont de seconde classe. Toutes sont situées sur le territoire de Dampicourt.

Celles de première catégorie représentent 6,57 % de l’ensemble des près détenus par le ménage. Elles produisent en abondance une herbe de première qualité. Le regain est fauché. Les prairies sont essentiellement situées sur les bords de la rivière Ton qui les fertilise et les arrose. Mais, si une inondation a lieu avant la rentrée des foins (événement peu fréquent), la récolte est abîmée par le limon déposé. Une minorité de prairies se situe sous le village où elles reçoivent les engrais par l’écoulement des eaux pluviales.

55,92 % de la superficie des praires du ménage sont de seconde catégorie. Elles principalement située le long de la rivière Ton, mais à des endroits plus élevés et moins arrosés que les terres de première classe ou l’inverse dans des endroits trop bas et trop humide. Dans ce cas, le séjour prolongé dans l’eau aigrit le foin. Une partie des prairies se situe dans de petits fonds collectant l’eau chargée d’engrais des terres labourables situées sur les coteaux environnants. Une partie des prés de seconde classe produise en quantité une herbe de bonne qualité, une autre partie est moins productive, mais l’herbe y est de grande qualité.

37,51 % des prés sont de troisième classe qui produise une herbe de mauvaise qualité. Ce sont des terrains plus ou moins marécageux, mais qui ont l’avantage de rester verts les étés chauds. Les 75 ares 40 centiares ne sont pas nécessairement un mauvais investissement, car il faut pouvoir nourrir les chevaux et le bétail en cas de sécheresse sans entamer le stock hivernal.

Les jardins du couple sis à Dampicourt sont de première qualité. Leur sol est le même que les terres labourables de première classe. On y cultive différents légumes, du lin et du chanvre. Quelques-uns sont arborés et produisent des fruits de bonne qualité.

L’analyse qualitative du domaine agricole met en évidence une particularité susceptible de diminuer la productivité de la ferme. Un peu plus d’un quart des terres labourables sont de bonne qualité, mais un peu moins de trois quarts sont de plus médiocre qualité. Les terres de la région étant réputé de bonnes qualités, le constat ci-dessus doit être relativisé, mais dans tous les cas la valorisation des terres entraînait un surcroît de travail et nécessitait un plus gros attelage pour labourer les parcelles.

Eu égard aux mode et rythme de constitution de la propriété, une seule explication s’impose. Jean-Baptiste Saint-Mard et son épouse Anne Marie Simon ont acheté les premières terres disponibles. Ils n’ont pas eu l’opportunité d’acquérir une masse plus importante de bonne terre.

Bulletin des propriétés — 1844

Nature Superficie Pourcentage
Terre labourable 10 h. 31 a. 81,83 %
Pré 1 h. 70 a. 60 c. 13,54 %
Jardin 29 a. 30 c. 2,33 %
Terre labourable — pâture - pré 26 a. 10 c. 2,07 %
Maison 2 a. 90 c. 0,23 %
Total général 12 h. 59 a. 90 c. 100,00 %

Classement des propriétés

Classement Superficie Pourcentage
1 95 a. 90 c. 7,61 %
2 3 h. 99 a. 50 c. 31,71 %
3 5 h. 43 a. 50 c. 43,14 %
4 1 h. 84 a. 10 c. 14,61 %
5 36 a. 90 c. 2,93 %
Total général 12 h. 59 a. 90 c. 100,00 %

Le bulletin des propriétés de 1844 ne concerne que les biens sis à Dampicourt qui a absorbé la commune de Montquintin. La veuve Saint Mard est propriétaire de terres à Villers-la-Loue.

Comme en 1822, la réparation des biens se distribue en courbe de Gauss. L’exploitation y est présentée sous de meilleurs auspices. La maison ferme est de première classe. 38,32 % de la superficie des terres labourables est de bonne qualité (classes 1 et 2), 44,72 % de moyenne (classe 3) et 16,95 % médiocre (classe 4 et 5). Dans le lot, nous avons deux parcelles de cinquième classe d’un total de 26 ares 10 d’une nature indéterminée terres, prés ou pâtures. Nous constatons aussi une amélioration du classement des prairies avec presque 40 % de bonne qualité (classe 1 et 2), 48 % de moyenne qualité (classe 3) et 12 % de mauvaise qualité (classe 4).

La propriété comprend :

Animaux

Les archives sont avares de renseignements à propos des animaux de fermes. De tous les inventaires après décès, celui de Jean Baptiste Saint Mard est le seul qui en comprend une liste. Au 18e, la ferme de Philippe Saint Mard à Dampicourt est documentée par des rôles fiscaux.

Au 19e siècle, en Gaume du sud et canton de Montmédy, l’activité principale voir exclusive des paysans est la culture des terres labourables. L’élevage des bovins est marginal. À la bonne saison, les bestiaux ne peuvent paître que dans une partie des prairies, car il faut récolter du foin et du regain pour nourrir les animaux de travail et les bovins à la mauvaise saison.

Au total, l’inventaire après-décès du 11 novembre 1816 [18] recense dans l’écurie cinquante et un animaux : treize bovins, huit cochons, dix-sept poulets et treize chevaux.

Les bovins se divisent en deux génisses – vaches n’ayant jamais vêlé, trois vaches, sept veaux de l’année et un taureau.

Quatre des huit cochons sont des porcelets.

La petite activité d’élevage devait avant tout servir à satisfaire aux besoins du ménage, mais il n’est pas exclu qu’il dégageât un petit revenu supplémentaire.

À la différence des bovins, les chevaux sont des animaux de travail. Ils tractent les chariots, tombereaux, labourent les terres. Leur nombre est un indicateur de statut social. Le ménage Saint Mard-Simon en possède treize : six chevaux mâles, six juments et un poulain. L’un est âgé de 9 ans, trois sont dits hors d’âge. Quatre sont âgés de trois ans, deux de cinq et deux de six ans. Ce dernier groupe constitue l’outil de travail de la ferme. Grâce à eux, Jean Baptiste est apte à labourer les terres les plus lourdes.

La robe des chevaux est soit bai clair ou brun, gris vineux ou noir zain.

Les animaux de ferme étant un bien précieux nécessitant beaucoup de soins en tout cas pour les chevaux, nous pouvons partir du principe qu’ils ont tous été emmené à Velosnes et qu’il n’en est resté aucun à Dampicourt.

Matériel agricole

L’inventaire après décès du 11 novembre 1816 à Velosnes [19] nous donne un aperçu incomplet de son matériel. En effet, le ménage ne dispose comme petit outil que six fourches et une brouette. Le charroi est plus conséquent.

Dans la cour, le notaire inventorie deux chariots montés, deux charrues montées et quatre herses.

Dans l’écurie, il découvre douze colliers garnis en mauvais état.

C’est un matériel de laboureur.

Récolte

En novembre 1816, dans la grange à Velosnes sont entreposées environ 4.000 gerbes de blé (farine de pain), 1.000 gerbes d’avoine (alimentation pour chevaux), 2.500 gerbes d’orge (alimentation animale et fabrication de la bière) ainsi que douze tonnes de mauvais foin (alimentation des animaux durant l’hivernage) qui appartiendrait à Madame de Marche.

Patrimoine minier

Le 25 juillet 1811 [20], Jean-Baptiste St Mard et Albert Leroy demandent un permis d’exploitation d’une mine de fer d’une superficie de 4 ares 15 centiares. Elle est située à Dampicourt, lieu-dit Dessous Court (Soucou) et leur appartient en indivision.

Le minerai exploité était la minette : fer de prairie ou fer tendre. La terre de mine se trouvait sous une couche de deux à quatre mètres de terre sablonneuse que l’exploitant devait déblayer. La production était essentiellement achetée par les forges de Berchiwé à Houdrigny. Au terme de l’exploitation, le terrain devait être remis en l’état (nivelé) [21].

Mode d’acquisition

Les actes de mutations patrimoniales précisent la nature de biens immobiliers. Lorsqu’il s’agit d’une prairie, la mention est toujours présente, mais dans les longues listes de terres labourables, plus d’une fois, le clerc oublie de mentionner la nature ou parfois les parties utilisent le terme « champ » dans des actes sous signatures privées. Par défaut, je considère les champs comme des terres.

No Type Surface Pourcentage
1 Achat de gré à gré 9 h. 86 a. 9,69 c. 48,13 %
2 Achat en vente publique 7 h. 97 a. 91 c. 38,95 %
3 Partage 2 h. 39 a. 86,52 c. 11,71 %
4 Échange 24 a. 84 c. 1,21 %
Total
20 h. 48 a. 71,21 c. 100,00 %

Les modalités constitution de l’exploitation agricole Saint Mard-Simon sont singulières. 87 % des terres et prairies ont été achetées, un peu moins de 12 % — bien propre à Anne Marie Simon — proviennent d’une donation. La part reçue des parents des époux est très faible.

L’exploitation agricole des parents de Jean-Baptiste Saint Mard n’était pas située à Dampicourt ni dans un village voisin, mais à treize kilomètres en aval, à Thonne-les-Près (France, Meuse). Il n’a pas eu l’opportunité d’héritier de biens dans le village. Son épouse Anne-Marie recevra un cinquième de bien de ses parents.

Si biens à Thonne-les-Près, il a dû en hériter un tiers, il les réaliser, car il n’était pas destiné à reprendre la profession de son père, mais à être prêtre. L’esprit romantique nous balance entre deux extrêmes. Jean-Baptiste est arrivé au village avec un pécule, une cassette produit de la vente de son héritage. Il a pu s’installer, garantir le paiement du loyer de la ferme de 26 hectares de Monsieur de Nonancourt. Broyons du noir, entre 1792 et 94, il se réfugie ruiné par les tourments révolutionnaires chez la veuve de Philippe Saint Mard dernier porteur du patronyme de la branche aînée.

Ce n’est pas très scientifique. Une évidence, la centaine d’actes le concernant ne permet pas de répondre à la question. Ses père et mère sont morts en 1775 et 1788. Si dans les registres de la prévôté de Montmédy en 1788, j’ai trouvé la nomination de son tuteur, je n’ai pas trouvé d’inventaire des biens. La distance, la difficulté d’accès des archives à Bar-le-Duc, ne m’a pas permis lorsque j’étais très motivé d’entreprendre un grand dépouillement comme je l’ai fait durant trois ans aux Archives de l’État à Arlon. Pour en avoir le cœur net, il faudrait notamment dépouiller le notariat de Montmédy à partir de la mort de son père pour y retrouver la trace éventuelle de la vente des biens.

Quel que soit l’état de fortune de Jean-Baptiste en 1792-94, le premier achat conséquent du ménage a lieu en 1804 soit dix à douze années après son arrivée à Dampicourt. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Une saine gestion des finances du ménage permette de justifier leur capacité à acheter en vente publique 3 hectares 64 ares, noyau de sa future exploitation.

Partage (3)

11,71 % de la superficie de l’exploitation y est entrée par voie de donation. Le 13 avril 1801 [22], les biens de la communauté ayant existé entre Pierre Simon et Hélène Collignon sont partagés entre les enfants issus du couple. Le lot no 2 d’un total de 2 hectares 39 ares est attribué à Anne Marie. De fait, s’ils intègrent l’exploitation, de droit, les biens appartiennent en propre à Anne Marie Simon.

L’acte de partage constitue une rente pour Hélène Collignon. Jusqu’à sa mort « naturelle », les bénéficiaires doivent lui remettre annuellement dans sa grange, le tiers du produit des terres et prairies partagées.

Achats en vente publique et de gré à gré (1 et 2)

Achat Superficie
15 février 1797 8 a. 43 c.
6 mai 1804 3 h. 64 a. 47 c.
13 avril 1805 8 a. 58 c.
24 janvier 1808 49 a. 53 c.
31 mai 1808 4 h. 75 a. 91 c.
3 mai 1809 4 h. 58 a. 88 c.
17 juillet 1809 34 a. 30 c.
10 mars 1828 42 a. 87,5 c.
23 mars 1828 29 a. 50 c.
19 juillet 1829 2 h. 86 a. 68 c.
4 avril 1831 12 a. 20 c.
24 juillet 1836 12 a. 65 c.

87,08 % de la superficie de l’exploitation y est entrée par voie d’achat (55,27 % de gré à gré et 44,73 % vente publique). Sept des douze acquisitions ont eu lieu du vivant de Jean-Baptiste Saint-Mard dont trois des quatre gros achats.

L’exploitation s’est créée essentiellement par un achat en vente publique (6 mai 1804) et deux acquisitions de gré à gré (31 mai 1808 et 3 mai 1809), soit 12 hectares 99 ares des 14 hectares achetés du vivant de Jean-Baptiste.

La quatrième grosse acquisition du 19 juillet 1829 (vente publique, 2 hectares 86 ares) marque la renaissance de la ferme de Dampicourt. À ce moment, Anne Marie Simon veuve Saint Mard est exilée à Velosnes (Meuse, France). Par cette acquisition et celles de 1828, elle démontre sa volonté de retour et de reprise en main de l’exploitation mise en fermage.

Échange (4)

L’échange n’est pas à vraiment parler un mode d’acquisition. L’entrée d’un bien est compensée par la sortie d’un autre de valeur équivalente. Si comme dans le cas de l’échange du 22 juin 1811 entre Joseph Neunheuser, propriétaire et maître de forges, domicilié à Dampicourt et Jean Baptiste St Mard, propriétaire, domicilié à Dampicourt, la superficie des biens d’un des coéchangistes augmente, c’est que la qualité des terres et prairies n’était pas identique en qualité.

Jean Baptiste et Anne Marie voient la superficie de leur bien s’accroître de 24 ares 84 centiares sans augmentation de valeur. La valeur locative estimée des biens échangés est de 15 francs formant un capital de 300 francs.

Mode de liquidation

Du vivant d’Anne Marie Simon

No Type Surface Pourcentage
1 Donation 3 h. 24 a. 41 c. 77,66 %
2 Vente à réméré 85 a. 75,5 c. 20,53 %
3 Vente 7 a. 58,6 c. 1,82 %
Total 
4 h. 17 a. 75,1 c. 100,00 %

Jusqu’à la fin de sa vie, Anne-Marie Simon a conservé la quasi-intégralité du patrimoine constitué du vivant de son époux. En simplifiant, nous pouvons dire qu’elle a donné à ses fils réinstallés avec elle à Dampicourt des biens qu’elle a acquis du temps de sa viduité.

Vente à réméré (2)

À la mort de Jean-Baptiste en juillet 1816, le couple est endetté à Velosnes. Le ménage n’est pas ruiné, il a conservé ses biens à Dampicourt, mais le déménagement précipité a entraîné des frais. Nous avons la certitude que la moitié du domaine est loué (bail à ferme). Nous devons considérer que la seconde moitié est encore exploitée par eux. Mais, ils sont partis avant les moissons. Les archives ne nous sont d’aucun secours pour découvrir les dispositions prises par le couple. Qui a récolté le fruit de leur travail et à quelles conditions ? En attendant ma mise en location la totalité des terres et près à Dampicourt, et la perception du produit de la récolte, Anne Marie Simon doit faire face à des difficultés de trésorerie.

Solidarité fraternelle. Son beau-frère Jean-Joseph Saint-Mard, chef d’escadron blessé dans sa dernière campagne, Officier de la Légion d’Honneur, en demi-solde, sauve la situation. Un contrat de vente à réméré [23] d’un montant de 1.300 francs et portant sur 85 ares 75,5 centiares de près est passé entre eux deux. C’est une vente par laquelle le vendeur se réserve le droit de racheter les biens vendus pour un prix déterminé. S’il n’a pas remboursé l’intégralité du prix et des frais de la vente avant un terme déterminé, les biens deviennent propriété de l’acheteur.

Le prix de la vente sera utilisé pour rembourser les dettes de la communauté. Anne Marie Simon devra rembourser le prix de la vente et les frais dans un délai de 5 ans. Le lien familial laisse penser qu’il n’y a pas réellement une sortie du patrimoine, mais plutôt un prêt garantit par un patrimoine immobilier.

Jean-Joseph décède avant le terme du contrat. De droit, les quatre enfants d’Anne-Marie héritent en indivision de la moitié de 85 ares 75,5 centiares. Anne-Marie Simon rachète, le 10 mars 1828 [24], à Anne-Marie Saint-Mard, sa belle-sœur habitant Thonne-la-Long, la moitié lui échut dans la succession de Jean-Joseph Saint-Mard (frère d’Anne-Marie Saint-Mard) pour un montant de 310 florins. De droit, la moitié héritée par les enfants ne rentre pas dans le patrimoine de la communauté, mais cette dernière en a la jouissance jusqu’à leur majorité.

Si le contrat ne porte que sur 5,19 % des biens de la communauté, son importance est inversement proportionnelle à cette valeur, car il démontre l’importance prise par Jean Joseph après le décès de son frère.

Donation (1)

De son vivant, Anne Marie a fait deux donations à ses fils.

Dans le présent travail, tant pour ce ménage que pour Louis et Anne Agathe Guillaume, il y a un biais de présentation qui se glisse dans mon analyse. Il y a une simplification hâtive. Après le décès d’un des époux, le survivant est pleinement propriétaire de la moitié indivise des biens de la communauté et conserve la jouissance de la seconde moitié héritée par ses enfants. Anne Marie Simon veuve Saint Mard est pleinement propriétaire des 2 hectares 39 ares qu’elle a reçus de ses parents et des biens qu’elle a achetés après le décès de son époux.

En 1815, l’exploitation familiale avait une superficie de 16 hectares et demi. En 1830, légèrement supérieure à 19 hectares.

Le 14 août 1835, Anne Marie donne à ses fils Jean-Baptiste et Louis un ensemble de terres et près pour une superficie totale de 3 hectares 24 ares soit 16,92 % de la surface de l’exploitation (pleine et nue-propriété). Le dépouillement des actes des notaires de Virton ne m’a pas permis de découvrir si les deux frères restés à Velosnes — Joseph et Jean-François — ont reçu une compensation financière.

Le 6 septembre 1846, Anne Marie Simon donne à ses enfants la maison et ferme familiale, ce qui a déjà été évoqué ci-dessus [25].

Vente (3)

Le 25 janvier 1818, Anne Marie Simon et sa sœur Marie-Josèphe Simon, veuve de Joseph Laurent vendent à leur sœur Marguerite Simon, veuve de Jean-Baptiste Reumond les quatre cinquièmes indivis de trois prairies à Dampicourt.

Anne Marie est propriétaire d’un cinquième soit 7 ares 58,6 centiares lui échu par le décès de Pierre Simon, son père.

Après le décès d’Anne Marie Simon

La déclaration de succession

La déclaration de succession [26] du 18 janvier 1848 comprend 53 articles pour une superficie totale d’un peu moins de 15 hectares (14,97 % de prairies et 85,03 % de terres labourables).

Nature Superficie
Prairie 2 h. 24 a. 50,5 c.
Terre 12 h. 75 a. 30 c.
Total général 14 h. 99 a. 80,5 c

Le total de la déclaration est largement inférieur au total des biens partagés le 17 décembre 1847 entre ses héritiers (différence = 1 h. 50 a. 81,75 c.) et inférieur à la superficie estimée du domaine agricole en 1845.

La déclaration ne permet pas de distinguer les biens indivis de la communauté ayant existé entre Jean-Baptiste Saint-Mard et Anne Marie Simon, et les biens détenus par cette dernière en pleine propriété.

Le partage des biens entre les héritiers

Nature Superficie
Prairie 2 h. 31 a. 31 c.
Terre 14 h. 19 a. 31,25 c.
Total général 16 h. 50 a. 62,25 c.

La succession a été partagée entre les héritiers le 17 décembre 1847 [27]. Contrairement à la déclaration de succession, le total des superficies est proche de l’estimation du domaine en 1845 (16 h. 30 a. 96,10 c.).

Lots
Héritiers Superficie Pourcentage
Jean François 4 h. 13 a. 66,5 c. 25,06 %
Jean-Baptiste 4 h. 28 a. 31,41 c. 25,95 %
Joseph 4 h. 25 a. 18,66 c. 25,76 %
Louis 3 h. 83 a. 45,66 c. 23,23 %
Total général 16 h. 50 a. 62,25 c. 100,00 %

Conformément au Code civil, le partage semble égalitaire en valeur même s’il existe quelques différences de superficies entre les lots.

Gestion du patrimoine

Le rétablissement des frontières de la France antérieure à la Révolution consécutive à la défaite de Napoléons Ier incite Jean-Baptiste Saint-Mard à quitter Dampicourt pour s’installer en France, sa terre natale. Au début de l’année 1815, il perd son mandat politique. Français, il ne peut plus être ni conseiller municipal et encore moins adjoint-maire. Le 15 avril 1815, il est contraint de prester un serment de fidélité aux Puissances Alliées. Le 25 avril 1815, soit dix jours plus tard, il charge le notaire Bernard Papier de Virton de procéder à la location publique de douze terres labourables et douze prairies lui appartenant.

Il serait tentant de voir une relation de cause à effet, mais la mise en location du quart d’un domaine agricole ne se décide et ne s’organise pas en dix jours. Sa décision était prise avant la provocation hollandaise.

La totalité des biens proposés à la location représente 4 hectares 78 ares 4,33 centiares soit 28,93 % du domaine agricole tel qu’estimé en 1815. La superficie des terres labourables (2 hectares 61 ares 56,33 centiares) représente 54,72 % du lot. L’intégralité des prairies du domaine Saint Mard-Simon — 2 hectares 16 ares 48 centiares — forment les 45,28 % restant du lot.

Les baux à ferme à conclure le seront pour une durée de 6 ou 9 ans. L’entrée en jouissance sera de suit. Le rendage ou rente à payer se fera le 11 novembre de chaque année. Le loyer sera d’un franc par 34 ares 30 centiares de terre et trois francs par chaque 34 ares 30 centiares de pré. Un décime sera exigé par franc exigible à chaque échéance pour frais d’enregistrements, timbres et honoraires.

Le 28 mars 1816, un second lot de terre est proposé à la location. Les quinze parcelles totalisant 3 hectares 17 ares 60 centiares représentent 19,22 % des biens du couple Saint Mard-Simon.

Au terme de l’adjudication, Jean Baptiste Saint Mard et Anne-Marie Simon n’exploitent plus que 48,16% de leur propriété. 7 hectares 95 ares 64,33 centiares de terres et prairies sont louées.

Les conditions sont les mêmes qu’en 1815 : Entrée en jouissance de suite. Paiement du loyer le 11 novembre de chaque année.

En 1816, vingt-cinq locataires fermiers exploitent un peu moins de la moitié du domaine Saint Mard-Simon. Le 11 novembre de chaque année, le couple percevra un revenu de 492 francs et 50 centimes.

Locataires Rendage (francs)
Charles Guillaume 9
Charles Rossignon 14,5
Claude Collignon 47
François Laurent 19
Henri Genin 18
Henri Genin et Charles Guillaume 18
Henri Joseph Farinel 4,5
Henri Stasser 52
Jacques Dropsy 18
Jacques Herbain 18
Jean Baptiste Brasseur et Maximilien Lambert 26
Jean Baptiste Deveaux 9
Jean Saussus 12
Jean-Baptiste Brasseur 34
Jean-Baptiste Deveaux 10,5
Jean-Baptiste Lecroche 12
Jean-Philippe Lambert et Charles Rossignon 20
Joseph Berg et Nicolas Degeneve 15
Maximilien Lambert 6,5
Nicolas Dropsy 9
Pierre Antoine Lambert 53
Pierre Antoine Leger 7,5
Pierre Joseph Collin 21
Pierre Joseph Goffette 24
Pierre Joseph Goffette 5
Toussaint Martin 10
Total général 492,5

Après le décès de Jean-Baptiste Saint Mard en juillet 1816, son frère Jean Joseph devient le fondé de pouvoir de sa belle-sœur. Néanmoins, le 28 avril 1817, Anne Marie Simon seule met en location trois pièces de terre sises à Dampicourt pour un terme de quatre ans. Les 60 ares 1 centiare produisent un loyer total de 800 francs que la veuve Saint Mard déclare avoir reçu. Les locataires sont Jean Michel, Nicolas Martin et Jean Baptiste Brasseur.

Le 21 juin de la même année, Jean Joseph St Mard en qualité d’homme d’affaires de la veuve Saint Mard fait procéder à la location par adjudication publique au plus offrant de dix-sept pièces de terre et prés, situés sur le finage de Dampicourt et appartenant tant à ladite veuve qu’à ses enfants mineurs. Le chef d’escadron découvre la ferme de son frère. Dans l’acte du notaire Bernard Papier, la nature des parcelles est erronée.

Locataires Loyers (franc)
François Thomas 11
Henri Lambert 4
Jacques Deveaux 14
Jean Baptiste Brasseur 29
Jean François Joannes 20
Joseph Berg 56
Louis Simon 102
Maximilien Lambert 8
Nicolas Martin 20
Pierre Simon 16
Thomas Manhaut 30
Toussaint Martin 10
Total général 320

Comme pour les précédentes locations, le risque est dilué. Les biens sont répartis entre plusieurs locataires qui doivent produire un loyer total annuel de 320 francs payable le 11 novembre.

Au commencement de 1817, l’exploitation familiale a une superficie de 15 hectares 66 ares 40,2083 c. Depuis 1815 et 1816, 7 h. 95 a. 64,33 c. sont sous bail à ferme. En 1817, 5 h. 62 a. 38,33 c. soit 35,90 % de la surface de l’exploitation en 1817 sont mises en location. À l’été 1817, 86,70 % des terres et prés sont loués.

En juin 1822, 1 hectare 13 ares 37,5 c. qualifiés de prés sont mis en location pour une année. Les quatre parcelles ne semblent pas avoir été louées précédemment. Quatre locataires Jean-Baptiste Collignon, Jean-Baptiste Guillaume, Jean Joseph Laforêt et Maximilien Lambert sont redevable d’un loyer de 35,9 florins. Depuis la mort de son beau-frère Jean Joseph saint Mard (1773-1821), Anne Marie Simon a repris la gestion du patrimoine.

En avril 1824, la maison-ferme à Dampicourt, son jardin et un « petit bien consistant en terre labourable ainsi que toutes ses prairies » sont loués à Thomas Magnette pour un terme de trois, six, ou neuf années qui prend cours 23 avril 1824. La maison semblait inoccupée. Monsieur Magnette « est obligé à rétablir le dit bien ainsi d’entretenir la maison et le jardin en bon père de famille. » Il s’oblige à payer chaque année 267 francs à payer en deux paiements la moitié à Noël et l’autre moitié à la St Jean. En sus, il doit payer les contributions quelconques.

Par voie d’huissier, le 30 décembre 1826, Anne Marie Simon lui donne congé pour le jour de la Saint George (23 avril 1827). À cette date, il devra vider les lieux et remettre les biens à la requérante en bon état de réparation locative. La fin du contrat de bail ne se fait pas sans heurt. Au mois de décembre 1827, la veuve Saint Mard lui ordonne par exploit d’huissier de battre dans le délai de trois jours tous les grains qui se trouvent déposés dans la maison. En janvier 1828, Thomas Magnette la cite à comparaître par-devant le Juge de paix du canton de Montmédy pour la voir condamner à lui payer la somme de 214 francs qu’elle lui doit tout pour ouvrage qu’il lui a faite, pendant que le requérant était son fermier. Les archives familiales n’ont pas conservé la trace de la conclusion de leurs différends.

À la vue de l’acte d’huissier de 1826, nous pouvons conclure qu’à cette époque, Anne Marie commençait à préparer un retour à Dampicourt qui ne sera effectif qu’à la fin de 1830.

Conclusion

Jean-Baptiste Saint-Mard époux d’Anne-Marie Simon est un personnage passionnant à étudier. Orphelin de père à huit ans, orphelin de mère à vingt et un an, il se destine à la prêtrise. Les tourments de l’histoire le renvoient à son milieu de laboureur. Revenant du séminaire de Trèves, il s’arrête à Dampicourt où vit la veuve du dernier Saint Mard de la branche aînée. Il intègre son cercle social, devient le fermier d’une famille importante, se marie, constitue un domaine agricole conséquent, devient conseiller municipal et adjoint-maire. C’est un notable.

Les défaites et abdications de Napoléons Ier bouleversent à nouveau sa vie. Français, il est écarté de la mairie. En 1815, il prend une décision fondamentale. Il organise son retour en France qui ne s’accomplira qu’au printemps. La vie lui jouera une dernière vacherie, il mourra prématurément en juillet 1816.

Sa veuve, qui me donne l’impression d’être une femme courageuse et ferme dans ses intentions, reviendra à Dampicourt vers 1830-31. Elle emportera dans ses bagages son fils benjamin, mon ancêtre.

À eux deux, Jean Baptiste et Anne Marie sont les personnes souches d’un rameau somme tout atypique dans la lignée Saint-Mard.



Notes et références

[1] Archives privées, Collège de la Sainte-Trinité à Trèves, attestation de fréquentation scolaire du 14 septembre 1792, rédigé en latin.

[2] Le 10 décembre 1794, baptême de Marie Jeanne Thiry fille de Guillaume Thiry laboureur et Marie Jeanne Jacques. Le parrain est Jean Baptiste St Mard résidant à Dampicourt. La marraine est Thérèse Didier de Montquintin.

[3] L’acte de mariage du 9 août 1796 à Dampicourt n’a pas été microfilmé par les Mormons. Le registre des mariages de 1796 se trouvait encore en juillet 1998 chez le diacre à Rouvroy. De nos jours, le registre ou un double a été déposé aux Archives de l’État à Arlon et est consultable en ligne.

[4] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, MICHEL Michel (1772-1846), minute no 10 du 27 pluviôse An V (15 février 1797).

[5] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, MICHEL Michel (1772-1846), minute no 81 du 6 mai 1804. Vente par hausse publique et en détail de deux corps de ferme réunis en un seul, appartenant aux héritiers de feu Paul Joseph Nonancourt propriétaire demeurant à Yzel, situés sur le territoire de Dampicourt et voisins.

[6] Archives privées, Bail à ferme conclu entre Jacques Herbain, bailleur, André Simon et Maximilien Lambert, les preneurs, enregistré à Virton le 09/06/1811 (Volume 13, recto, case 3).

[7] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, HENRI Adolphe (1829-1832), minute no 371. Le 4 avril 1831, vente publique d’immeubles situés sur le ban de Gérouville et d’Houdrigny, appartenant à feu Catherine Lambinet, épouse de Mathieu Collignon, de Houdrigny. « Anne Marie Simon, veuve de Jean Baptiste Saint Mard, cultivatrice, acceptant par le sieur Jean Baptiste Saintmard, son fils, cultivateur, tous les deux demeurant à Dampicourt » y achète un champ contenant 12 perches 20 aunes carrées.

[8] Superficie et voisinage suivant : Belgique, Archives de l’État à Arlon, Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Cadastre du Royaume des Pays-Bas, Grand-Duché de Luxembourg, Commune de Dampicourt, Bulletin des propriétés no 178 — période 1822.

[9] Archives privées, Acte de donation entre vifs faits et passé le 6 septembre 1846 à Virton, en l’étude du notaire Lambinet, enregistré à Virton, le 07-09-1846 (volume 86, folio 42 verso, case 5).

[10] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, FONTAINE Édouard (1872-1900), minute no 1290.

[11] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, FONTAINE Édouard (1872-1900), minute no 1290.

[12] Archives privées, Acte de donation entre vifs faits et passé le 6 septembre 1846 à Virton, en l’étude du notaire Lambinet, enregistré à Virton, le 07-09-1846 (volume 86, folio 42 verso, case 5).

[13] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, FONTAINE Édouard (1872-1900), minute no 1290.

[14] Archives privées, Inventaire après décès réalisé par Joseph Antoine Auspice Thiebault, Notaire Royal à Montmédy (Meuse).

[15] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Cadastre du Royaume des Pays-Bas, Grand-Duché de Luxembourg, Bulletins des propriétés — période 1822 : no 178 (commune de Dampicourt), no 187 (commune de Montquintin), no 224 (commune de Villers-la-Loue).

[16] Archives privées.

[17] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, PAPIER Bernard (An X – 1821), minute no 109.

[18] Archives privées, Inventaire après décès réalisé par Joseph Antoine Auspice Thiebault, Notaire Royal à Montmédy (Meuse).

[19] Archives privées, Inventaire après décès réalisé par Joseph Antoine Auspice Thiebault, Notaire Royal à Montmédy (Meuse).

[20] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Archives de l’Administration du département des Forêts, Commune de Dampicourt, Exploitation de la mine de fer (1811), cote : 425b-28.

[21] Bernard Joannes, Et si Dampicourt et Mathon m’était comtés…, Les éditions de la Joyeuserie, 2005, pages 261-266.

[22] Archives privées, 3 Germinal an IX.

[23] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, PAPIER Bernard (An X – 1821), minute no 171 du 11 novembre 1816.

[24] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Notariat de Virton, MARSON Joseph Édouard, minute no 4189.

[25] Archives privées, Acte de donation entre vif fait et passé à Virton le 6 septembre 1846, en l’étude du notaire Lambinet, enregistré à Virton, le 07/09/1846 (volume 86, folio 42 verso, case 5).

[26] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Administration de l’enregistrement et des domaines, Bureau de Virton, Déclarations de successions, volume no 56, déclaration no 3404.

[27] Belgique, Archives de l’État à Arlon, Archives des Institutions de droit public (époque contemporaine), Administration de l’enregistrement et des domaines, Bureau de Virton, Actes civils, Volume 90, folio 77 verso, case 3 à 80 verso, case 2 (Volume 171 dans la numérotation des A.E.A).